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© COLORS // 'YOA - Le Collectionneur | A COLORS SHOW'
28 août 2024

Yoa : « Ça devait sortir, un peu comme un cri »|INTERVIEW

par Corentin Fraisse

Après son -très bon- EP Nulle sorti au début de l’été, Yoa a écumé les routes de festivals. En l’espace d’une semaine, elle a joué au premier soir de Rock en Seine, puis a dévoilé sur la chaîne YouTube de Colors une nouvelle chanson intitulée ‘Le Collectionneur’. Elle y chante les violences sexuelles qu’elle a subies en s’adressant directement à l’agresseur. On en a parlé avec elle.

 

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On était là pour te voir au premier soir de Rock en Seine, comment s’est passé le live pour toi ? Comment tu t’es sentie ?

Yoa : Ça s’est super bien passé. J’avoue qu’en arrivant j’ai eu un peu peur. On m’avait prévenu que c’était pas une des grandes scènes habituelles de Rock en Seine.* J’avais peur qu’il y ait vraiment personne. Je m’étais préparée en me disant que c’était pas grave si je jouais devant peu de gens. Et en fait j’ai passé un super moment, les gens étaient présents, vraiment à fond et actifs ! C’est un concert dont je me rappellerai.

*-Pour rappel, Yoa jouait sur la scène Firestone, pendant que sur la Main Stage se préparait le live de Lana Del Rey, ultra-tête d’affiche de la soirée. Yoa a, à plusieurs reprises, fait des interventions micro pour remercier le public d’être resté alors que Lana jouait à côté-

 

Tu viens de présenter chez Colors ta nouvelle chanson ‘Le Collectionneur’. Tu l’as présentée comme « la chanson la plus importante de [ta] vie ». Comment est l’accueil du public, depuis que c’est sorti ?

Yoa : Honnêtement, je sais que tous les artistes disent ça à chaque fois qu’il y a une sortie, qu’ils n’ont « jamais vu ça » en termes d’engouement et de soutien… Mais pour le coup là, c’est très très vrai. Je n’ai jamais eu autant de gens qui m’écrivent. L’accueil est super cool et très émouvant, très prenant. Beaucoup m’écrivent pour me parler de leur histoire personnelle, des agressions qu’ils et elles ont subies. Et tout est fait dans un respect et une bienveillance incroyables.

 

En quoi cette chanson était nécessaire, autant pour toi que pour toutes les personnes qui se sont senties vues, comprises, peut-être moins seules ?

C’est un soulagement d’avoir sorti ce truc et je pense que ça a aussi fait du bien aux gens. Au départ, je n’avais pas prévu d’écrire une chanson sur ce qui m’est arrivé. Mais l’an dernier, la vie a fait que cet événement a ressurgi dans mon quotidien de manière psychotraumatique : c’est mon psy qui m’a conseillé d’écrire là-dessus.

Je suis partie toute seule, deux jours à Trouville dans un AirBnB. Je me souviendrai toujours de quand j’ai écrit la chanson. J’avais la topline du refrain depuis des mois. Comme je fais d’habitude je me suis assise, j’ai commencé à écrire et je n’ai pas arrêté tant que la chanson n’était pas bien. Le texte n’a jamais bougé depuis, on a enregistré la chanson très vite après : on a fait une prise voix, qui n’a jamais bougé.

Pour moi, l’impulsion est venue parce que ça devait sortir, un peu comme un cri. Et c’est peut-être pour ça que ça touche. Parfois, quand on a vécu des trucs comme ça, on a juste envie de crier.

 

« J’ai pas crié, comment t’aurais pu deviner ? (…)
Est-ce que ça n’arrive qu’à moi ?
Est-ce que tu sais pourquoi tu l’as pas fait aux autres ?
Et que tu regrettes ou pas, cette chanson est pour toi
Ça s’ra jamais ma faute »
Yoa – ‘Le collectionneur’

 

Dans le texte de ta chanson, tu t’adresses directement à l’agresseur (« tu es celui qui viole »). C’était important pour toi que le propos soit droit, sans détour ?

Oui, ce que je recherche en général quand j’écris c’est faire simple, beau, direct et pas compliqué. Pour que tout le monde puisse comprendre, aimer, apprécier. J’ai essayé de l’écrire pendant quelque temps cette chanson, de la manière la plus juste et qui sonnait le plus sincèrement pour moi c’était cette adresse directe, à la première personne.

 

‘Le collectionneur’ pourra s’intégrer dans un de tes projets futurs, ou c’était une chanson à part ? 

Je pense qu’elle aura sa place sur mon album.

 

Tu voulais ajouter quelque chose, pour celles et ceux qui ont vécu les mêmes choses que toi?

Même au sein de ma famille quand ça m’est arrivé, je n’ai pas été écoutée tout de suite. Ma parole n’a pas été reçue tout de suite comme une parole légitime. On m’a remise en question avant de m’écouter, avant de me croire.

Tout ça pour dire que si jamais on a été victime, c’est important de faire les choses à son rythme, de trouver les bonnes personnes avec qui en parler. Si jamais, pour les personnes qui lisent ceci, vous n’êtes pas seules. Toutes ces violences là sont légitimes à ressentir et on est très nombreuses. En gros, on est ensemble.

 

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Pour rappel, de nombreuses associations/collectifs/structures sont là pour recueillir la parole et accompagner les potentielles victimes. Par exemple Nous Toutes, Paroles de femmes – Le relais, la FNSF, Femmes pour le dire femmes pour agir ou encore la CFCV.

Numéro SOS viols femmes informations (0800 05 95 95)

 

 

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