À Ibiza, 1 artiste sur 5 est une femme ou gender fluid

par | 18 06 2025 | news

© Kei Scampa | provenant du compte pexels de Kei Scampa

Clubbing TV sort une étude listant, sur chaque line-up annoncé par les clubs d’Ibiza, les artistes féminines ou personnes gender fluid passées derrières les platines. Résultat : on retrouve 22% d’entre elles et eux, sur la programmation de l’Île blanche. On ausculte ça de plus près.

Parmi les palmiers et les stroboscopes, on entend en sourdine une vieille mécanique en marche : celle d’un boys club qui se perpétue derrière les platines. « Où sont les femmes ? » Bonne question Patrick. En 2025 à Ibiza, les femmes et personnes gender fluid représentent donc 22 % des artistes bookés. Pas très paritaire. Deux ans après une première alerte en 2023, le constat reste sensiblement le même.

Ibiza a longtemps incarné une promesse : celle d’un ailleurs hédoniste, île refuge pour marginaux, hippies, punks, clubbers et fêtards de tous bords. À partir des années 1980, le mythe s’est cimenté autour du Balearic Beat, de la house importée de Chicago, des clubs en plein air… et d’un idéal de liberté — corporelle, musicale, identitaire.

En 2025, derrière les façades de l’île blanche et les line-ups clinquants, une étude indépendante pilotée par Laureline Teste (journaliste et dirigeante de Clubbing.TV) vient rappeler les limites de cet affranchissement affiché. En compilant plus de 980 bookings sur cinq mois, elle révèle que seuls 22 % des artistes programmés à Ibiza cette saison, s’identifient comme femmes ou gender fluid.

En chiffre, Ibiza ça donne quoi ?

En 2023, une première analyse similaire menée par Teste avait déjà mis en lumière l’extrême déséquilibre : moins de 20 % de diversité de genre sur les grandes scènes d’Ibiza. Deux ans plus tard, la légère progression (22 % en 2025) reste trop marginale pour refléter un réel basculement. 766 hommes contre 214 artistes femmes ou non-binaires : une répartition qui parle d’elle-même.

Certaines résidences emblématiques affichent des taux encore plus faibles :

  • Marco Carola à Pacha : 9,7 %
  • The Martinez Brothers à Hï Ibiza : 12,1 %
  • CircoLoco à DC-10 : 19 %
  • Mixmag Sessions à Amnesia : 20.0%
  • Carl Cox à UNVRS :27,3%

Même sur des projets menés par des femmes, comme BLOND:ISH à Pacha, la structure masculine reste dominante : 6 femmes pour 26 hommes.

Une logique de réseaux masculins ?

« L’écosystème fonctionne encore comme un club d’hommes fermé« , explique Laureline Teste. « Les mêmes résidents masculins s’invitent d’une saison à l’autre, perpétuant les mêmes dynamiques — pendant qu’une génération entière d’artistes femmes et queer est reléguée aux warm-ups ou aux side rooms. »

Le problème ne tiendrait donc pas à un manque de talents, mais bien à la manière dont les têtes d’affiche sont sélectionnées — et au poids économique que représentent les grands noms masculins, dans les stratégies de billetterie.

Ce qui se joue à Ibiza dépasse ses plages et ses dancefloors. L’île concentre les regards et les standards d’une industrie club globale. Sa programmation agit comme une vitrine du présent — mais aussi comme une machine à reproduire le passé…

La visibilité des artistes femmes et gender fluid dans ce cadre n’est pas seulement une question d’équité : elle touche à l’imaginaire de la scène électronique. Si Ibiza veut toujours incarner la liberté, il serait temps que ses scènes et line-ups représentent celles et ceux qui la font vivre.

« En 2025, il existe une infinité de productrices et DJs gender fluid prêtes à prendre ces scènes  », conclut Laureline Teste. « Mais tant qu’aucune transformation structurelle n’aura lieu, on continuera à stagner autour des 20 %. »

Retrouvez ici, l’ensemble de l’étude !