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©Deezer ©Sacem © Tima Miroshnichenko
17 janvier 2025

Deezer x Sacem: ‘artist-centric’, enfin un modèle viable ?

par Siam Catrain

Deezer et la Sacem annonce pour ce début d’année, une réforme de leur modèle de rémunération des droits d’auteur.ices. Un premier pas vers un payement plus juste des artistes indépendants.

« Tout arrive à point à celui qui sait attendre ». Il faut finalement croire dans la force des dictons. Ce 15 janvier, Deezer et la Sacem ont annoncé la mise en place d’une nouvelle version de leur modèle de redistribution des droits d’auteur. Il s’appelle « Artist-Centric« (APCS) et concerne exclusivement les droits d’auteurs sur Deezer en France. Rien à voir avec un nouveau symptôme dermatologique étrange. Ici, on parle d’un modèle dans lequel « une part plus importante de ce que les abonnés paient, revient aux artistes qu’ils écoutent, tout en permettant de lutter contre la fraude. » Mais qu’est-ce que ça change, concrètement ? 

Ce changement notable dans l’histoire du streaming a été engagé pour tenter de trouver une réponse aux débats gravitant autour d’une répartition plus équitable des revenus.

Pour comprendre comment toute cette chaine d’acteur.ices fonctionne, le mieux est de commencer par une question que tout le monde se pose (évidemment) : que vaut un stream ? Et bien, difficile d’avoir la réponse puisque la valeur d’un stream, donc une écoute d’au moins 30 secondes, dépend de la plateforme, la méthode d’écoute (abonnement ou freemium) et le pays d’écoute de l’auditeur (qui modifie logiquement le prix de l’abonnement).

 

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Actuellement, la majorité des plateformes utilisent ce modèle, aussi appelé « pro-rata » ou « pool global ». L’ensemble des revenus générés par les abonnements et la publicité sont répartis entre tous les artistes. Par exemple, Spotify reverse environ 70 % de ses revenus totaux aux titulaires de droits d’auteur (labels, producteurs, éditeurs, etc.), mais ce montant est ensuite divisé entre tous les artistes en fonction du nombre de streams.

Selon Ditto Music, un artiste moyen gagne environ 0,003 à 0,005 USD par stream sur Spotify. Si un artiste indépendant reçoit 1 million de streams, il pourrait toucher seulement 3 000 à 5 000 USD, ce qui est évidemment bien inférieur aux coûts de production, de marketing et de distribution. Uniquement 1 % des artistes les plus populaires ont le privilège de capter près de 90 % des revenus sur la plateforme. Cette situation rappellera peut-être à certain.e le dernier épisode de The Playlist de Per-Olav Sørensen et Hallgrim Haug, consacré à la plateforme… Ou bien à la pétition « Justice at Spotify » signée à ce jour par plus de 26 000 artistes.

 

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Le modèle Artist-Centric, adopté par Deezer et la Sacem, comprendra maintenant un certain nombre de réglementations permettant de réduire les dérives de ce système de rémunération. Un ‘plafond utilisateur’ est introduit pour limiter l’impact individuel de chaque abonné sur la répartition des royalties. Cela garantit qu’une plus grande part des paiements des abonnés profite directement aux artistes qu’ils aiment et écoutent, tout en réduisant les incitations aux comportements frauduleux.

Pour au moins 1 000 streams provenant de 500 abonnés différents chaque mois, les artistes sont à présent récompensés par une « prime » doublant la rémunération pour chacun de leur stream. Ce bonus sera aussi appliqué aux tracks recherchés régulièrement ou ajoutés dans des playlists non-algorithmiques.

La démarche de ce modèle « Artist-Centric » vise à pousser à la création, en mettant en avant les artistes et les communautés fidèles d’auditeurs qui les suivent. Pour permettre cela, une batterie de nouveaux mécanismes contre la fraude, sont renforcées pour préserver la consommation des contenus musicaux de la plateforme.

Deux axes seront abordés pour permettre de mettre en avant ce que Cécile Rap-Veber (directrice générale de la Sacem) appelle « la vraie musique » : « [exclure] les contenus parasites et [tenir] mieux compte de la diversité des esthétiques, des genres appréciés sur la plateforme. » Avec ce nouveau système de redistribution, l’idée est d’en finir avec les fermes à stream, les contenus de 30 secondes poussés par l’algorithme et le matraquage des genres les plus mainstream ou dans les tops chart.

 

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Non, Deezer ne se transforme pas grâce à la Sacem en les Transmusicales de Rennes. Il reste encore à voir comment ce modèle sera concrètement appliqué. Mais ce premier pas vers une rémunération juste ouvre la voie (petit-à-petit) vers une industrie qui se concentre sur son cœur de métier : la musique et ses artistes. Qui sait, un jour, peut-être l’argent de nos streams ira directement dans les poches des artistes qu’on aime.

 

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