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© James Blake - James Blake / ATLAS
11 mars 2024

« Les gens pensent que la musique est gratuite »

par Olivia Beaussier

« Le lavage de cerveau a fonctionné : maintenant les gens pensent que la musique est gratuite » a récemment déclaré James Blake dans un tweet. Si vous pensiez que la guerre entre UMG et TikTok s’était estompée, détrompez-vous. James Blake vient en tout cas de relancer le débat. On s’en parle un peu plus.

Voilà d’où part le constat de James Blake. Selon le concerné, quand sa chanson « Godspeed » avec Frank Ocean est devenue virale sur TikTok, ni lui, ni son collaborateur n’ont gagné un centime sur ce potentiel pactole. L’artiste a pris la parole début mars sur X (ex-Twitter), pour dénoncer une industrie qui veut toujours faire plus de profit, sans mieux rémunérer le point névralgique de son existence : les musiciennes et les musiciens.

« Les sites de streaming ne paient pas assez, les labels veulent une part plus grosse que jamais et attendent juste que tu deviennes viral, TikTok ne paie pas assez, et partir en tournée devient de plus en plus cher pour la plus part des artistes » s’exprimait James Blake. Si l’on en suit cette logique, il devient alors impossible de créer de la musique de qualité.

Sur TikTok, il ne suffit que d’un échantillon de sept à quinze secondes pour devenir viral. Oubliez alors les ponts et refrains de quarante secondes. Finis les intros instrumentales d’une minute qui t’immergent lentement dans la chanson. Il faut que tout aille vite, droit au but : un petit clavier catchy, une boucle qui sonne bien, un refrain simple sans trop de mots, et hop, dans la boîte direction TikTok. Et si la chanson rend bien en version accélérée ou ralentie bourrée d’écho, vous maximisez vos chances de percer !

 

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« Si vous voulez de la musique de qualité, quelqu’un va devoir payer pour ». Et ce n’est sûrement pas TikTok qui mettra ça en place, ni les sites de streaming. Bel écho avec le dernier communiqué de Spotify, se disant inquiet que la taxe ne profite pas directement aux artistes. Une hypocrisie à peine cachée qui ne duperait plus personne, surtout quand  la musique n’a jamais été aussi peu chère à créer.

Au-delà de la dimension artistique, la musique est aussi une machine à consommer mais surtout à capitaliser, et dont les profits reviennent souvent aux mêmes : les réseaux qui la diffusent, et non ) ceux qui la créent. James Blake concluait en écrivant « Le lavage de cerveau a fonctionné, maintenant les gens pensent que la musique est gratuite ».

Mais si vous n’étiez pas déjà assez terrorisé face à ces nouvelles, James Blake en rajoutait une couche en expliquant que cette façon d’écouter la musique facilite le chemin vers une industrie d’IA, où la musique est gratuite. Belle perspective d’avenir, non ?

On doute que les mots de James Blake soient suivis de répercussions. Mais ils ont déjà été vivement acclamés par nombreux de ses confrères-sœurs (comme Lous And The Yakuza, Metro Boomin, Tyler, The Creator…) Alors concluons cet article, qui ressemble plus à un edito qu’autre chose, en citant ce fameux James Blake : « The industry is beyond f*cked and musicians are getting f*cked harder than anyone”. On promet, c’est lui qui le dit, pas nous !

 

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Update : Comme en ont parlé nos confrères et consœurs des Inrocks, les tweets de James Blake n’ont pas été vains. Le musicien s’est inscrit sur la plateforme de streaming Vault, sur laquelle il a mis en ligne des exclusivités. Pour y avoir accès, les utilisateurs peuvent s’abonner au profil de James Blake, pour 5 dollars par mois. Cet argent ira directement au musicien – plus d’intermédiaire, entre les artistes et leurs fans – « De la musique directement de moi à vous » comme le disait le concerné. James Blake a également activé la possibilité d’un chat pour que ses fans interagissent sous ses chansons : encore moins d’intermédiaire entre les deux.

Dans une vidéos sur X (ex-Twitter), l’artiste expliquait son concept, rappelant qu’un million de streams sur une plateformes de streaming rapporteraient environs 3.000 dollars, dont plus de la moitié irait au label, au marketing etc… Compliqué pour un musicien de vivre comme cela. Vault est alors présenté comme une alternative.

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