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© Jules van Eijs
22 octobre 2024

Left of the Dial 2024, joyeusetés rock à Rotterdam | LIVE REPORT

par Tsugi

À l’occasion de la 7e édition, le festival rotterdamois Left of the Dial a réuni environ 130 artistes issus de la scène rock émergente internationale du 17 au 19 octobre. Nous nous y sommes rendus, on vous raconte et donne quelques conseils avisés ! 

Par Marie Courtès

moleskine left of the dial

© Jules van Eijs

“Vous allez à Left of the dial ? Oh ! (rires) On y a été invité à deux reprises, vous allez vous éclater !” nous racontait le bassiste de Chalk, pendant qu’un autre membre du groupe irlandais montrait fièrement le t-shirt du festival, jolie coïncidence. Depuis cet échange, on partait avec un a priori plus-que-positif pour notre virée Rotterdam.

Participer à ce festival se prépare comme toute bonne épreuve olympique. Privilégiez des chaussures confortables, un plan de la ville et un cornet de frites entre chaque concert. Pour les vitamines, car vous allez déambuler durant trois jours dans seize salles, à la rencontre de près de 130 artistes et groupes.

Autant le dire de suite : les Britanniques ont très largement dominé ce line-up, même si quelques irréductibles Français tels que Moleskine, En attendant Ana et Albert Jupiter ont résisté.

 

Sur tsugi.fr : Left of the Dial, Rotterdam au rythme du rock

 

Une fois sur place, n’osez pas arriver en retard sous peine d’attente, car le festival s’est rapidement imposé comme rendez-vous incontournable pour les Rotterdamois. Fondé en 2018, le showcase-festival se donne pour mission de rassembler le meilleur de la scène émergente rock, au cœur de la deuxième ville des Pays-Bas. Le nom fait directement référence au titre de The Replacements -le morceau préféré des fondateurs. Mais il se veut aussi être un clin d’œil aux stations radio américaines sur lesquelles, pour atteindre les fréquences les plus alternatives, il faut tourner le cadran le plus à gauche.

 

Hasard de dingue

Avant notre départ, nous avions joué les élèves modèles en voulant créer une liste d’immanquables. Mais face à une programmation aussi dense, nous avons succombé à ce qu’on appelle « le laisser-aller » : le choix laissé au hasard. On ne regrette pas cette décision.

Au détour d’une description d’un jeune groupe britannique, le terme gabber saute aux yeux. Ni une ni deux, nous nous retrouvons dans une des salles du très feutré De Doelen face à Ebbb. Alors qu’on craignait une collision brutale entre deux radicalités musicales, on a assisté à l’osmose déroutante entre rock et des sonorités gabber parfaitement dosées, le tout lié par la voix d’enfant de chœur du chanteur. Une musique qui n’a cessé de flirter avec le sacré, tout en nous faisant bouger. Nous ne sommes d’ailleurs pas les seuls à avoir eu un faible pour Ebbb puisqu’ils ont signé leur premier EP All At Once chez Ninja Tunes. Pssst, le trio jouera à Paris dans le cadre du Pitchfork Festival, à suivre donc de (très) près.

 

Fantaisies jubilatoires

Les sonorités électroniques avaint ouvert notre week-end à Left Of The Dial. Elles l’ont également bouclé : avec le set aussi loufoque que génial de Dopplr. Jeune duo venu de Leeds, dont le premier membre cache sa dégaine de Thomas Bangalter derrière des synthés créés par ses soins : tandis que le bassiste arbore avec panache des lunettes à la Gilbert Montagné. Bien au-delà des looks, on s’est complètement fait embarquer par leur musique traversée par une ribambelle de genres, allant de la jungle à la bass au disco en passant par le jazz. Autour de nous, un public plus que conquis n’a cessé d’en redemander et de tenter ses pas de danses les plus fous, pour coller à ce set délirant.

 

Sur tsugi.fr : Fat Dog, ni queue ni maître

 

Une excentricité au doux nom de Mermaid Chunky (littéralement ‘Sirène trapue’) nous a interpellés. Dans le fond du bar Warm, on entrapercoit un long chapeau à poils jaune, porté par Moina Moin. Entre deux accords de flûtes à bec, on s’approche et découvre la seconde membre, Freya Tate vêtue d’une robe rouge vaporeuse enveloppant son visage rehaussé d’un blush criard. Mermaid Chunky est la dernière bizarrerie venue de DFA records, label de LCD Soundsystem. En 2024, elles présentaient slif slaf slof, un sept-titres loufoque où psyché, house, pop et folk se bousculent dans une réalité parallèle farfelue et absurde. ‘C’est curieux hein ? Je t’avais prévenu ! Moi, j’aime bien !’ s’extasie un festivalier.

 

chunky left

© Marcel van Leeuwen

 

Attention, nouveau conseil : ce n’est pas un mythe, les Néerlandais sont géants et n’épargnent personne lors des pogos ou moshpits. C’est marrant, certes, mais à vos risques et périls. On y a notamment laissé un menton et quelques orteils durant le concert survolté de Tanz Akademie. Leur premier album Hullabaloo aux accents post-punk et indie-rock dessine les frontières d’un univers horrifique et surnaturel. Tanz Akademie est d’ailleurs une référence au film d’horreur italien Suspiria. A contrario le concert du jeune groupe grunge Keo au cœur d’une salle de danse de salsa (ça ne s’invente pas) était auréolé d’une bienveillance émouvante, à laquelle on ne s’attendait pas. Timidement, le chanteur confie : « C’est notre premier concert en dehors de l’Angleterre, donc merci beaucoup pour votre soutien. » Face aux quatre gueules de poupons britanniques, la foule ne cessait de sourire, danser et de fournir leurs encouragements comme des parents fiers de leur progéniture.

 

left of the dial

© Jules van Eijs

 

Finalement, on a compris pourquoi ce festival se déroulait à Rotterdam et nulle part ailleurs. Alors que nous nous immiscions en septembre dernier au festival strasbourgeois Musica, la scène néerlandaise était mise à l’honneur en marge d’une collaboration avec le festival Rewire de La Haye et Nord Sonore, l’un des organisateurs nous expliquait : ‘Les Néerlandais ont cette facilité déconcertante à mélanger les genres artistiques, à être hybride sans même se dire qu’ils le sont… » Rien d’étonnant alors, en cette fin octobre à Rotterdam, d’assister au concert de Famous, groupes post-punk au sein de la sublime Église Arminius, vestige du XIXe siècle.

Détruite quasiment en intégralité durant les bombardements de la Seconde Guerre mondiale, la ville actuelle de Rotterdam n’existe que depuis une soixantaine d’années. Un foisonnement architectural tentaculaire a ainsi vu le jour au sortir de ce drame et a embarqué avec lui une émulation culturelle dénuée de barrières. Ce n’est pas pour rien que Rotterdam est l’une des terres natales du gabber, sous-genre de hard techno tiré du terme yiddish signifiant ‘ami’ ou ‘frère’, qui a gagné sa popularité dans les années 1990. Left of the Dial, ce n’est finalement que l’émanation d’une jeune ville qui ne cesse de se réinventer par l’art.

 

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Meilleur moment : On repense encore au concert complètement fou de Ebbb.

Pire moment : Le moment où un festivalier d’1.95m nous a balancé son bras en pleine gorge durant un pogo. Ne riez pas trop, on a cru s’étouffer.

 

Par Marie Courtès

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