Les Ambiantes : écouter différemment I PORTRAIT
En avril dernier, alors qu’on se rendait en soirée, on découvrait Les Ambiantes. Le jeune collectif propose des sessions d’écoutes de downtempo et d’ambient tout en mêlant des activités artistiques ou spirituelles. Après cette fête, on a eu la chance de discuter avec les trois fondatrices, on vous raconte.
26 avril, 23h30. On se dirige vers le spot accueillant la Foehn, une série de soirées intimistes organisées autour de Paris. On est évidemment ravis de retrouver Vera pour un set de trois heures avant que Venard ne prenne le relais jusqu’au petit matin. Mais patience. Elle s’adonnera d’abord à une session de « Sound Healing », comprenez, une méthode utilisant les vibrations sonores à des fins thérapeutiques.
Loin d’être les plus aguerris sur le sujet, on a bien tenté de jouer les curieux, mais on a dû se contenter d’un « ce sera une expérience un peu magique » de la part d’un des organisateurs. Bon. Une fois arrivés, on croise Estelle, Louise et Audrey, les fondatrices du collectif Les Ambiantes. Elles se sont rencontrées à Grenoble lors de leurs études, et aussi et surtout en soirées : « On a passé énormément de temps sur le dancefloor ! Moi à ce moment-là, j’écoutais beaucoup de house », raconte Audrey. « Oui, beaucoup, beaucoup de house pour Audrey ! », s’amuse Estelle.
D’amatrices de musiques électroniques, elles deviennent organisatrices de soirées pour le label grenoblois Nymphony Records. « Au fil des années, j’ai commencé à me lasser », révèle Louise. « Moi ce n’était pas forcément un sentiment de lassitude, mais d’insécurité. Je ne me sentais pas tout le temps safe en soirée », rétorque Audrey, également bénévole dans l’association Consentis.info, dédiée à la prévention des violences sexuelles et discriminatoires en milieu festif.
Passé les portes du spot, l’une d’elles nous aborde : « Est-ce que vous souhaitez participer à une session de sounds healing ? La seule condition est de ne pas parler ni d’utiliser son téléphone. » On accepte sans broncher et on entre dans la salle. Le spot, qui nous était pourtant familier, nous paraissait bien étranger. À l’intérieur, une vingtaine de participants a pris place sur des coussins. Le centre de la pièce est recouvert de tapis épais, seules quelques guirlandes lumineuses éclairent le lieu.
À l’arrière, un lit et une personne installée dessus. Vera est à côté, un diapason à la main, elle le pose sur le diaphragme de l’homme, puis change d’objets. Chacun de ses gestes est millimétré, répété dans un ordre précis, ritualisé. Vera est calme et semble déconnectée de l’environnement qui l’entoure.
En fond, des tracks d’ambient aux boucles psychédéliques rythment la session. L’homme se relève, prend Vera dans ses bras puis se rassoit. Trois mains s’agitent instantanément. Pendant une heure et demi, les gens se succèdent près d’elle. Autour, les autres sirotent un thé, s’endorment, certains chuchotent : « Elle a une énergie de fou », raconte l’un d’eux à son ami.
La session se termine. Vite, les organisateurs et Les Ambiantes se pressent d’enrouler les tapis et les luminaires. L’équipe de l’Atelier Cinetic peaufine les derniers détails de sa scénographie et Vera revêt sa casquette de DJ, s’installant derrière les platines.
Quelques mois plus tard, le collectif se souvient « d’un moment spécial » dont elles avaient secrètement rêvé : « Lorsque nous avons fondé Les Ambiantes, on s’était dit que le but ultime était de travailler avec Vera ! », confie Louise. D’autant plus spécial que Vera était à la fois DJ et intervenante. Durant cette session, le collectif avait pour mission « d’accompagner Vera pour aménager un espace dans lequel elle se sente à l’aise », poursuit-elle.
Les Ambiantes, une approche nouvelle
Depuis février 2024, Les Ambiantes invite DJ et artistes, féminines et issues de minorités de genre, à construire ensemble un moment où musique et discipline artistique ou spirituelle doivent « se répondre mutuellement, sans que l’un ne prenne le pas sur l’autre ». Bienveillance, tolérance et sécurité sont les maîtres mots de ces séances : « On veut créer des espaces dédiés à l’écoute des sonorités ambient et downtempo et que le public comme les artistes se sentent en confiance », ajoute Audrey.
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Lors de la première séance en février dernier, quelques participants ont assisté à un cours de yoga animé par Anne, tout en écoutant un set de la DJ et comédienne Cloutch, conçu spécialement pour l’occasion.
Au-delà de l’expérience vécue par le groupe, Les Ambiantes rassemble des femmes aux univers parfois très différents : « C’est un travail de co-construction super intime qu’on propose aux invitées. Anne et Chloé (Cloutch) ne se connaissaient pas. Notre rôle a été de les mettre en relation et de faire en sorte qu’elles puissent apprendre à se côtoyer et à travailler dans de bonnes conditions », raconte Audrey.
La deuxième session proposait une activité de dessin – animé par la dessinatrice Masha Moran – le tout sur un set planant de la DJ oror. Une nouvelle fois, ce rendez-vous était accessible à tout le monde peu importe son niveau dans la discipline : « On ne recherche pas la performance, mais plutôt l’introspection, c’est pour cela qu’aucun niveau n’est requis pour venir à nos sessions » précise Audrey.
Un exercice souvent nouveau pour les artistes et pas toujours facile à appréhender : « Lorsque nous avons reçu Alexia et Just1, elles étaient un peu stressées, elles ont même tenu à prévenir les participants, ce qui les a finalement aidées à se détendre ! » confie Louise. Ce jour-là, l’implication des deux DJ, basées à Berlin, avait beaucoup touché les trois amies. Elles avaient d’ailleurs fait testé leur session en amont à leurs amis, comme on a pu le voir sur leur Instagram.
Le collectif n’est pas prêt de s’arrêter là, il sera présent au Feodum Festival (6 au 8 septembre) !