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Ladytron - Light & Magic
22 avril 2024

Tsugi retro-chronique: 2002, ‘Light & Magic’ par Ladytron

par Olivia Beaussier

2002 : année de l’euro, de Jacques Chirac réélu au second tour face à Jean-Marie Lepen, du Brésil à la Coupe du monde… C’est aussi l’année de naissance de celle qui écrit ces lignes. Alors, pourquoi ne pas revenir sur un des albums marquants -et peu souvent cités- de 2002, parmi les prémices electropop que nous réservaient les années 2000 : Light & Magic de Ladytron.

Parler de 2002, c’est assez rapidement mentionner le début du (court mais très intense) règne d’Avril Lavigne ? Cette année-là, la musique pop est bercée par le rock tendance adolescente qui envahit la sphère publique. Guitares électriques passées au tamis, voix aigües bien métalliques, cheveux qui tournent au vent… On y est.

De l’autre côté du spectre musical, en 2002, les synthés de Ladytron s’agitaient dans Light & Magic. Un album un peu vite oublié, dont l’héritage électronique résonne pourtant encore -même dans le secret- sur la scène actuelle.

« They only want you when you’re seventeen, When you’re twenty-one, you’re no fun » chante Helen Marnie, une des solistes de Ladytron. Paroles innocentes, qui changeront la carrière des quatre Britanniques. Après un premier album en 2001, 604, qui connait son petit succès, Light & Magic révèle le groupe au grand public, le sortant définitivement de l’univers undergound auquel il n’a jamais vraiment appartenu.

L’album s’ouvre sur un bourdonnement électronique tout droit sorti d’un ordinateur. La couleur est annoncée : fini la batterie ou les guitares cinglantes, on sort les synthés, en 2002, électronique ce sera. Et ces synthés, on les sort bien comme il faut, presque à n’entendre plus qu’eux. La voix vient en second, remplie de sons numériques, comme si peu à peu, les machines remplaçaient l’humain. C’est bien là que réside le but de l’album. Ladytron vient questionner l’existence humaine, tels des extra-terrestres venus sur Terre en voyage.

Ladytron, le portrait d’une génération

Les fans du groupe britannique tenteront désespérément de faire de Light & Magic une critique consciente de la culture et de la société de consommation. Pourtant, force est de constater que Ladytron ne dénonce pas vraiment. « Blue Jeans » parle de Jeans bleus, « Cracked Lcd » parle d’écrans fissurés, et « Black Plastic« … de plastique noir. Entre connotations sexuelles, références aux jeux vidéo, et gadgets électriques qui envahissent l’ère de cette époque, le disque tire le portrait identitaire d’une génération à travers leurs besoins matériels, sans plus de jugement.

Et apparemment, en 2002 la jeunesse se drogue, fait l’amour sans trop d’intérêt, fume des clopes, traîne en ville et recommence, en attendant que la vie passe. « A red cell, a perfect view out of the novotel Sat gently listening to this song It started over again » chante Helen Marnie dans « Fire« . Sans avoir plus de contextes aux quelques bribes de paroles -à peine audibles tant la voix est modifiée-, impossible de passer à côté de l’ennui omniprésent que décrit le groupe.

Cet ennui qui nous fait nous sentir cloîtré dans une cellule et où la vue d’un Novotel devient un paysage idyllique. Une chanson se répète, enfermant encore plus les adolescents sur leur petit quotidien, de la même façon que les boucles musicales de Ladytron reprennent sans cesse.

 

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Cette indifférence au monde et le sens de l’humour décalé du groupe marquent une distance qui devient le leitmotiv de Light & Magic. Le tubesque « Seventeen » en est la preuve. Les paroles minimalistes et l’air de synthé robotique surprennent, car pendant 4 min 37, tout ce qu’on peut entendre est une boucle qui se répète. Légère critique de l’industrie des standards de beautés de la société, dont tout le monde aura rapidement oublié le sens, y compris Ladytron et leurs apparences toujours à la pointe de la mode – en témoigne la pochette de l’album.

Il serait malhonnête de réduire Ladytron au genre trop large et fourre-tout qu’est la synth-pop. Inévitablement électronique, le groupe a surfé sur ce qui commençait à devenir les prémices d’une électropop des années 2000, sans jamais dépasser la barrière de l’europop. Dosant habilement entre air nostalgique des années 70-80 et sons numériques futuristes, le groupe a exécuté le parfait retro-progressiste électronique qui peut s’apparenter aujourd’hui au travail de The Weeknd, Lewis Ofman, Coco & Clair Clair et bien d’autres.

« Cessent-ils d’exister, quand tu ne leur manques plus ? » questionne Ladytron dans « Cease2xist« . Ces aliens de la musique auraient-ils trouvé l’essence même de l’humanité ?

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