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© Yohann Cordelle
3 juin 2024

We Love Green 2024 : Justice pour tous | LIVE REPORT

par Corentin Fraisse

110 000 festivaliers ont foulé -dans la boue, sans aucun doute- le bois de Vincennes pour un nouveau week-end dantesque à We Love Green. Sur scène et en dehors, c’était la fête avec des superstars et une certaine idée de (la?) Justice. On vous raconte. 

We Love Green c’est, en général, un symbole du lancement avant l’heure de l’été parisien. Cette année, la grisaille et la pluie en ont décidé autrement. Le déluge du vendredi a fait de la boue notre meilleure alliée en ce week-end de festival. (Rien à voir, toutefois, avec les conditions encore pires de l’édition 2022.) Ce qui n’a pas découragé les 110 000 personnes qui se sont retrouvées à We Love Green 2024.

 

Lire sur tsugi.fr :: Renaissance sous le déluge, quand We Love Green 2022 devient We Love Rain

 

Évacuons tout de suite l’éléphant de la pièce : le point d’orgue du week-end, sans équivoque, c’était le passage de Justice samedi soir (qui nous a fait louper celui d’Anetha sur la scène Lalaland, au même moment). Premier concert français de la tournée. Après près de 48h de pluie qui a détrempé le site du festival, les averses semblent déguerpir pour de bon, juste avant le live d’Augé et De Rosnay. Providence ?

justice we love green

© @atelieroz

Côté scéno, fini le mur d’amplis Marshall ; place au plafond inclinable, aux cubes de lumière et bras articulés avec une douzaine de panneaux. Xavier et Gaspard sont face à face sur le même podium. Les croix sont toujours là, illuminées. Les basses de ‘Genesis’ se font ressentir et se mêlent assez vite à ‘Generator’, l’un des tracks incendiaires du récent dernier album. Ça monte progressivement, les remixes et arrangements sont efficaces. Le duo sait gérer les variations d’intensité, pour 1h15 de show grandiose, live en technicolor qui n’oublie de taper très fort. Justice donne au public ce qu’il est venu voir : du grand spectacle. On glisse vers la fête décomplexée (notamment via un gabber retrouvé). On en prend plein la gueule pour pas un rond. La fougue de leurs seize ans, des étoiles dans les yeux de l’assistance.

 

L’électronique en force

D’autres artistes électroniques ont évidemment marqué ce week-end à We Love. On pense très fort à Kaytranada (voir ici son passage, en replay gratuit sur france.tv) qui a fait chavirer corps et coeurs. Le chapiteau de la Clairière était beaucoup trop petit pour le Canado-Haïtien, ce qui a créé une jolie cohue. La performance était assez folle, comme son attitude et son aisance en français. La qualité et la puissance du son ne sont pas dingues, mais ça ne gâche pas le moment. Kaytra enchaîne ses tubes et ses feats les plus connus, avec sa recette magique house-soul-r&b, cette basse étouffée et ce sens du rebond. Des remixes fous de ‘Cuff It’, ‘Assumptions‘ ou ‘Kiss It Better‘… Le public est tombé en amour. Et on le comprend.

On aura forcément passé beaucoup de temps à la scène Lalaland, par exemple pour Sherelle, tapageuse ou festive pendant 1h30, entre jungle, footwork et un esprit entre rave et boum fin années 1990 ; Mais aussi les Londoniens de Chase & Status, accompagnés comme souvent de MC Rage et d’Andy Gangadeen sur scène. Drum&bass, dubstep, ragga et libération ; un DJ-set très inégal de Skepta (oui oui, en DJ-set), assez ennuyeux finalement, extrêmement bien rattrapé par l’amapiano queen Uncle Waffles, impressionnante de technique et de charisme (on salue également la chevelure rouge façon Rihanna époque Loud).

Même s’il était programmé tôt, on aurait été déçu de rater Four Tet, qui a parfaitement embarqué la foule avec une énergie à toute épreuve -je rêve ou il a remixé ‘Call Me Maybe’ ?- ; même chose pour l’Australienne Logic 1000, pas venue pour blaguer ; son compatriote Skin on Skin pour un set explosif… Et la clôture du weekend pour la scène Lalaland, avec un trio en b2b2b Étienne De Crécy – Boombass – DJ Falcon : à la hauteur des promesses et des attentes.

 

« C’est que le travail ouais, c’est pas la techa ouais »

Ce week-end était aussi l’occasion de voir des superstars éclore, ou confirmer ce statut. Très bons concerts pour Crystal Murray, pour Eloila tête dans le caisson’ (qu’a-t-elle à envier d’une rockstar?), pour Kenya Grace (l’hyperpop tiktokesque a finalement marché sur nous), Meryl (comment résister à cette énergie?) ou encore BadBadNotGood, pour du jazz-fusion dans lequel on voudrait s’envelopper pour toujours.

Grandes prestations pour Shay, pour Yamê et pour L’Impératrice. Shay a enflammé la Clairière, même scéno impressionnante qu’aux Flammes. Entre rap et chant, chorés langoureuses avec danseuses cagoulées… Et cette façon de maîtriser la foule, on ne peut qu’admirer. Yamê confirme son statut de nouvelle star francophone et, en le voyant en concert, le mot est faible. C’était littéralement une démonstration de tout ce qu’on peut attendre d’un live, surtout en formation complète. Les danseurs, les choeurs, les arrangements, le batteur monstrueux, le charisme de Yamê… Ses interactions avec le public, la voix droite en toutes circonstances, les accords jazz… ‘Ayo Mba’, ‘Quête’, ‘Business’, ‘Lowkey’, ‘Call Of Valhalla’ et bien sûr l’ultratube ‘Bécane’. D’ailleurs, qu’est-ce que c’était que ce remix incroyable (ci-dessous) ? Yamê est une superstar, sa team et lui méritent tout ce qui leur arrive.

L’Impératrice aussi offre un grand show, avec ses tenues incroyables, du disco, l’assurance des grands groupes et du funk pur (coucou à mes gars sûrs de la Guillotière, bien ’69latrick Scarface’) qui a fait danser l’immense assemblée postée devant la grande scène. Dans le public ça a donné l’une des vidéos les plus mignonnes du week-end. On a eu droit à une reprise de ‘Aerodynamic’ de Daft Punk, l’injouable solo de guitare en prime. Flore est une superstar, plus aucun doute là-dessus. Elle profite d’ailleurs de l’occasion pour montrer son engagement, en appelant à aller voter aux élections européennes avant ‘Danza Marilù’, jusqu’au moment de quitter la scène sur un ‘free Palestine’.

Engagements

Dans cette période trouble où le discernement, la morale et la honte semblent peu à peu disparaître, certains ont tenu à montrer leur engagement. ‘Free Palestine’, c’est également ce qu’a scandé la superstar SZA en brandissant un drapeau palestinien, comme Ninho (sans oublier de glisser un mot pour le Congo et le Soudan) ou encore TIF dimanche soir, lui qu’on sait très engagé pour la cause palestinienne : « à la base je suis pas un rappeur engagé, je voulais pas être politisé malheureusement on manque un peu d’humanité (…) free Palestine jusqu’à la mort« .

Côté engagement, on est à We Love Green alors inévitablement, on parle écologie et avenir du monde. Les menus sont 100% veggie, les prises de parole se sont enchaînées sur la scène du ThinkTank, de nombreuses organisations (Banlieues Climat, Le Jeune Engagé, Surfrider, Ma voix mon choix) étaient présentes sur le festival et avant chaque concert, des spots de prévention et des messages étaient diffusés sur les grand écrans. En revanche mini-bémol : le principe des couverts à déconsigner est super, mais c’est intenable de faire 30-40 minutes de queue pour qu’on nous reprenne une assiette. Même chose côté toilettes : il va falloir en rajouter.

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Grand succès à nouveau pour ce week-end de We Love Green, qui a commencé dans la souffrance et le déluge, pour finalement parfaitement lancer l’été parisien. On n’a pas pu citer tous les artistes vus ce week-end (déso Burna Boy, Lysistrata, King Gizzard, Meel B, Hamza ou encore Lewis OfMan) mais croyez-nous : ces trois jours furent dantesques, et rares sont les artistes qui sont passés à côté de leur prestation. Merci We Love Green, et à l’année prochaine.

 

Pire moment : l’enfer pour rentrer jusqu’au métro (fermé) le vendredi soir, dans la boue et sous la pluie battante. Un peu de lumière sur le chemin + des panneaux de direction n’auraient pas été de trop

Meilleur moment : Justice, Yamê, L’impératrice. Superstars

we love green justice

© @atelieroz

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