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© Pochettes d'album
30 avril 2025

5 années qui ont changé la drum’n’bass

par Siam Catrain

Entre 1995 et 2000, la drum’n’bass a connu un âge d’or insensé avec la publication d’albums ambitieux, parfois trop, mais qui ont ouvert les frontières d’un genre jusque-là réservé à l’underground et au dancefloor. Dix disques indispensables à (re)découvrir.

un article de Max Di Caro à retrouver aussi dans le mag 179 : Comment la Drum’n’bass a conquis le monde.

 

Omni Trio – The Deepest Cut Vol. 1 (Moving Shadow, 1995)

Œuvre du producteur venu du nord de l’Angleterre Rob Haigh, The Deepest Cut Vol. 1 regroupe ses premiers maxis et présente ses tracks les plus emblématiques comme « Renegade Snares » et « Living For The Future », où un piano à la Erik Satie surfe sur le breakbeat. Sa patte sonore se caractérise par des influences house dans les samples vocaux et de voluptueuses nappes de claviers jouées par Haigh en personne. Une musique empreinte d’une grande sensualité. Typiquement le genre de qualificatif auquel on ne pense pas lorsque l’on évoque la drum’n’bass. C’est ça le miracle Omni Trio.

 

Alex Reece – So Far (4th & Broadway, 1996)

Découvert par Goldie sur son label Metalheadz, ce jeune producteur de l’Ouest londonien est considéré avec son complice Wax Doctor comme l’inventeur du jazzstep, courant où, comme son nom l’indique, la drum se mixe avec le jazz. Vite repéré par les majors grâce à la grande accessibilité de ses compositions, Reece signe un premier album mélodique et puissant où l’on retrouve les classiques « Pulp Friction » ou « Ibiza » et la soul magnifiquement vocalisée par Deborah Anderson « Feel The Sunshine » Oui, la drum’n’bass peut être ensoleillée. Malheureusement ce lever de soleil a été sans lendemain.

 

Roni Size Reprazent – New Forms (Talkin’ Loud, 1997)

Couronné du prestigieux Mercury Prize l’année de sa sortie, cet album réussit la prouesse d’être à la fois ambitieux tout en restant parfaitement populaire. Avec la volonté de créer la bande-son du troisième millénaire, Roni Size et sa bande (DJ Suv, DJ Die, Krust, la chanteuse Onallee et Dynamite MC) nous entrainent dans une montée vers les étoiles avec une drum futuriste nimbée de jazz, de soul et de funk. On se souvient à l’époque du sentiment extraordinaire d’entrer dans un univers musical inconnu. S’il n’y avait qu’un seul disque à conserver de cette liste, ce serait certainement celui-ci.

 

Photek – Modus Oprandi (Science, 1997)

La mise en lumière du don hors du commun de Rupert Parkes. La programmation des machines, la maestria visionnaire des arrangements et une imagination fertile excluant toute forme de redite : tous les composants d’un disque sidérant et sidéral inspiré autant par Star Wars que par les arts martiaux japonais, avec lesquels Photek partage le même sens de la discipline. Derrière un hermétisme de façade se cachent une richesse des climats, une science du rythme et surtout une vision avant-gardiste proche de maîtres tels Kraftwerk ou Miles Davis. Carrément.

 

À lire sur tsugi.fr : Mara : Shatta, drum’n’bass et ‘foulamerde’ | INTERVIEW

 

Ed Rush&Optical –  Wormhole (Virus Recordings, 1998)

Aux manettes, le tandem Ben Settle, alias Ed Rush, et Matt Quinn, alias Optical, qui règne sur un courant dénommé tech-step. Soit d’énormes basses funky pilonnant des beats drum métalliques, pendant qu’au loin grondent des nappes synthétiques menaçantes. Le duo possède un talent fou pour arriver à glisser dans ce bouillant magma quelques petites lignes ou gimmicks mélodiques. Une incontestable ambiance de fin du monde plane sur ces compositions, comme imaginées pour constituer la bande-son d’une grande fiesta déjantée, prélude au bug du millénaire. Qui n’est heureusement jamais arrivé.

 

Grooverider – Mysteries Of Funk (Higher Ground, 1998)

DJ émérite, pionnier légendaire de la drum, le Londonien passe la surmultipliée à l’occasion d’un double album fidèle à la promesse suscitée par son titre. On entre bien dans un univers tout en clair obscur, souvent vocalisé, où le funk mais aussi le jazz fusion et la soul prennent des couleurs futuristes sous les poussées de la drum. Avec l’aide de son pote Optical, ici ingénieur du son, Grooverider évolue en permanence en équilibre sur un fil où l’élégance peut côtoyer une certaine lourdeur emphatique. Point trop n’en faut comme on dit. Mais le duo arrive toujours à retomber du bon côté. Ouf.

 

4hero – Two Pages (Talkin’ Loud, 1998)

Le label fondé par Gilles Peterson tente de refaire le coup réussi deux ans auparavant avec le carton Reprazent. L’ambition est encore au rendez-vous, puisque Dego et Marc Mac utilisent au maximum des instruments organiques sur le disque 1, manifeste jazz-soul où la drum n’est que le vecteur de l’imagination débordante du duo. Changement radical de climat avec le disque 2, dark et orienté tech-step, reflétant l’autre capacité des deux hommes à taper fort. Trop d’audace, le public n’était pas prêt. Dommage.

 

Source Direct – Exorcise The Demons (Science, 1999)

En grande partie compilation de tracks parus en maxi sur Science, cet album se vit comme une passionnante digression futuriste autour du sample « Amen Break », la pierre de Rosette du breakbeat drum’n’bass. Assez fou d’ailleurs de voir comment ce duo de la banlieue sud de Londres arrive avec un minimum d’effets à en tirer un maximum de sensations. Comme sur le somptueux « Love & Hate », qui étire sur plus de neuf minutes des vocaux éthérés, un piano jazz et le roulement incandescent d’une batterie vaudou. Aujourd’hui culte.

 

À lire sur tsugi.fr : Amen Break, 6 secondes de beat qui ont changé le sampling

 

Aphrodite – Aphrodite (V2, 1999)

Gavin King construit son succès en déclinant à l’infini mais sans redites les mêmes principes : un breakbeat pas trop compliqué, de bonnes grosses basses vibrantes et cerise sur le gâteau, souvent, un jouissif sample hip-hop. On retrouve ici ses principaux hymnes, comme le bien nommé « King Of The Beats« , en passant par le bien plus cool « Summer Breeze » à la douceâtre saveur R&B. Un florilège bondissant, où l’absence de toute expérimentation novatrice apparaît comme un véritable bain de fraîcheur. Simple et funky.

 

LTJ Bukem – Journey Inwards (Good Looking Records, 2000)

Premier album du DJ et producteur dont les compilations Earth nous ont tant ravis. Il aura mis une dizaine d’années pour arriver à enfin sortir ce double album (encore un) où il condense tous les sons qui font vibrer sa drum’n’bass très organique, dominée par un jazz-funk inventif. Avec l’appui de quelques musiciens, il crée une musique réellement intemporelle, inspirée et surtout très homogène. Pas de tubes évidents, mais pas non plus de tentatives expérimentales. Un cheminement finalement assez « middle of the road » pour ces compositions cinématographiques, un bonheur pour l’illustration sonore. Hier comme aujourd’hui.

 

À lire sur tsugi.fr : Tsugi Mag n°179 : ’Comment la Drum’n’bass a conquis le monde’ dispo partout 🗞️

 

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