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21 janvier 2025

TikTok banni aux USA : ça change quoi pour la musique ?

par Siam Catrain

Depuis 2017, TikTok s’est imposé comme une étape indispensable dans la promotion et la découverte musicale. Mainte fois critiqué pour son côté addictif, pour son algorithme trouble et ses posts creux, le réseau social chinois semble sentir le vent tourner suite à une possible interdiction de l’application aux États-Unis. Alors concrètement cette interdiction, ça change quoi ?

Le 17 janvier 2025, la Cour suprême des États-Unis a confirmé à l’unanimité une loi fédérale interdisant TikTok à moins que sa maison mère chinoise, ByteDance Ltd., ne vende ses opérations américaines avant le 19 janvier. En réponse, TikTok a suspendu ses services le 18 janvier, rendant le contenu inaccessible et supprimant l’application des principales boutiques en ligne.

Digne d’une série américaine, un retournement de situation vient redonner le sourire aux 170 millions d’utilisateurs américains (soit la population de la France, de l’Espagne et de l’Italie). Le jour fatidique, ce 19 janvier, à la suite d’une déclaration du président élu Donald J. Trump, TikTok a rétabli ses services aux États-Unis.

 

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Une annonce plutôt étonnante venant du nouveau président des États-Unis, qui avait enclenché lors de son premier mandat des sanctions contre la plateforme. Néanmoins, TikTok reste en sursis : les promesses faites par la Maison-Blanche, pour retarder l’interdiction par un décret exécutif, n’auront qu’une durée de 90 jours. Reste à voir si les faveurs du gouvernement Trump seront assez convaincantes pour séduire le réseau social chinois et faire céder une partie de la « poule aux œufs d’or » au géant américain.

 

Sueurs froides pour l’industrie musicale

En quelques années, TikTok s’est imposé comme acteur incontournable de l’industrie musicale, avec plus d’un milliard d’utilisateurs mensuels. Sa viralité a permis à des titres comme « Houdini » par Dua Lipa de devenir des phénomènes mondiaux, tout en redonnant un coup de projecteur à des titres comme « Somethin’ Here » de Terrence Parker ou « Dreams » de Fleetwood Mac. De nouvelles personnalités sont sorties du chapeau des algorithmes TikTok mettant en avant des artistes maintenant dans les top charts tels qu’Artemas, Doja Cat ou Bb trickz.

Selon une étude commandée par TikTok, 75 % des utilisateurs affirment y découvrir de nouveaux artistes, et 63 % y entendent de la musique qu’ils n’avaient jamais entendue auparavant. L’influence de TikTok ne se limite pas à la découverte musicale. Aux États-Unis 38 % des utilisateurs ont assisté à un concert live et 45 % ont acheté des produits dérivés d’artistes au cours des 12 derniers mois, des chiffres supérieurs à ceux des auditeurs traditionnels.

« C’est probablement la plateforme publicitaire la plus efficace pour convertir les fans et les découvrir » affirme pour Pitchfork Joe Aboud, fondateur de la société de conseil en musique 444Sounds et ancien directeur du marketing chez Atlantic Records

 

L’industrie musicale face à un tournant

Avec l’interdiction de TikTok, les professionnels du secteur doivent repenser leurs stratégies de promotion. Des alternatives comme Instagram Reels et les YouTube Shorts existent, mais elles n’offrent pas le même potentiel de viralité que TikTok.

Immédiatement après l’interdiction, dans le chaos et la confusion qui règnera sur le secteur, les créateurs se réfugieront sans doute dans des alternatives, comme Xiaohongshu (mais qui sait combien de temps, étant donné les circonstances de l’interdiction de TikTok). Les développeurs produiront de nouvelles applications similaires. D’autres pourraient s’accrocher à TikTok en utilisant des VPN.

 

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Une partie de l’industrie prévoit un retour à des méthodes de promotion plus traditionnelles. L’habitude qui était de découvrir des talents dans les bars, de manière organique, est sûrement la seule qui vaille vraiment le coup. Ici, pas question de community manager ou d’algorithmes, les seules interrogations sont : « Est-ce que le public aime ça ? L’artiste a-t-il un vraiment ce « je-ne-sais-quoi » ? »

Retour d’un véritable développement de l’artiste ? Fin des algorithmes capricieux gérés par les Big Data ? Oui. Mais de manière aussi nostalgique, la fin de TikTok, c’est aussi  :

« La démolition de la machine à viralité anarchique et souvent merveilleuse de la plateforme, comme indique Kieran Press-Reynolds pour Pitchfork. Aucune autre plateforme n’a propulsé autant de monstres inconnus et de bizarreries auditives en si peu de temps : Le bedroom’n’bass de PinkPantheress, le charabia gothique de Yeat’s « Gët Busy », les odyssées théâtrales de Hemlocke Springs, l’horrorcore next-gen de sigilkore. Certes, l’algorithme frénétique mais ultra-précis – parfaitement calibré pour découper de petites communautés dans l’éther d’Internet – a eu des conséquences négatives, en boostant certains sites de pure pacotille. Mais le génie rachète l’ordure. »

 

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L’industrie de la musique n’y échappe pas. Lors des grands bouleversements des modèles de promotion, les Majors risquent souvent très peu Ici (encore), ce sont les artistes indépendants qui sont en première ligne et subiront les premières répercussions des ravages. Le plus étonnant est certainement de se dire que c’est l’un des millionnaires le plus controversé des États-Unis, aux antipodes du progressisme, de l’underground ou de l’art, Donald Trump qui permettra aux artistes en devenir, de poster leur ultime TikTok.

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