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7 mai 2021

🔊 Le nouveau label français Grid veut sortir ces sons impossible à étiqueter

par Antoine Barsacq

Aujourd’hui sort Improvisations, la première sortie du label français Grid lancĂ© par l’artiste Clad. Pour cĂ©lĂ©brer la sortie de cette superbe compilation internationale dĂ©diĂ©e au son britannique, on lui a posĂ© quelques questions.

On avait dĂ©jĂ  croisĂ© Clad sur les ondes de Rinse France pour sa rĂ©sidence mensuelle avec E-Unity, son compère avec lequel il forme GDN. Comme ses sets le laissaient transparaĂ®tre, son amour pour la musique made in UK n’est pas un secret : UK bass, UK techno… tout ce qui a l’adjectif « UK » collĂ© au nom du genre rĂ©sonne dans son cĹ“ur. Alors quoi de plus logique pour le DJ (ou plutĂ´t ce « selectah ») que de continuer son travail de curateur en fondant un label dĂ©diĂ© Ă  ces musiques ? Grâce au confinement, ce projet qui trotte dans sa tĂŞte depuis longtemps s’est concrĂ©tisĂ© et a donnĂ© naissance Ă  Grid, qu’il lance aujourd’hui avec une première compilation intitulĂ©e Improvisations, aux tracks Ă©lectroniques inclassables, Ă  la croisĂ©e du dubstep, de la drum’n’bass et de la techno.

Grid, ça remonte à quand cette envie de monter son propre label ?

Grid

DR

L’envie remonte à plusieurs années, depuis déjà deux ans on parle de monter un label ensemble avec E-Unity, sur lequel on sortirait des artistes principalement issus de la scène techno ou bass anglaise. Une chose en amenant une autre, il s’est orienté sur d’autres projets et le Covid-19 est venu mettre tout le monde en stand-by. On s’était dit qu’on allait arrêter la résidence mensuelle, donc j’avais soudainement du temps devant moi et je me suis dit fin 2020 que c’était le bon moment pour monter un nouveau projet.

« Je pense que la musique de demain viendra de jeunes qui s’ennuient et qui tentent un truc différent en bidouillant à tâtons. »

Quelle musique comptes-tu y défendre ?

L’idĂ©e principale est de mettre en avant de la musique novatrice, sur laquelle on mettrait difficilement une Ă©tiquette. Ça paraĂ®t large et pourtant ça rĂ©duit pas mal ce sur quoi je me focalise. J’ai toujours aimĂ© me prendre des claques quand j’écoute de la musique, les Anglais ont cette science de l’innovation sonore et c’est cette recherche qui me touche le plus, donc j’aimerais apporter ma pierre Ă  cet Ă©difice. C’est plus un Ă©tat d’esprit : l’envie de toujours remettre en question sa propre esthĂ©tique, tenter des associations nouvelles, aller piocher dans des styles lointains pour les remodeler selon d’autres codes. Je ne connais aucune autre scène des musiques Ă©lectroniques qui soit autant attachĂ©e Ă  proposer de la musique d’avant-garde. J’aurais du mal Ă  m’investir sur des morceaux qui ne m’impressionnent pas ou qui proposent des sonoritĂ©s que j’ai entendues et rĂ©-entendues ; j’aime bien quand ça m’interroge, quand c’est inclassable, quand ça me dĂ©passe un peu. Je pense que la musique de demain viendra de jeunes qui s’ennuient et qui tentent un truc diffĂ©rent en bidouillant Ă  tâtons. Ceux-lĂ  seront compris par des gens qui cherchent constamment Ă  ĂŞtre surpris, pas par des gens arrogants qui demandent le respect des anciens. J’aimerais dĂ©fendre ces jeunes qui viennent avec une vraie proposition.

 

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Parle-nous de cette première compilation…

Quand j’ai dĂ©cidĂ© de lancer le label, je me suis directement dit qu’une compilation rassemblant diffĂ©rents artistes serait la manière la plus humble de se lancer. Je ne voulais pas d’une compilation longue qui aurait eu un aspect fourre-tout. En plus, cette limite m’oblige Ă  donner un aperçu clair des styles qui seront mis en avant par la suite. De manière indirecte, ça m’Ă©vite d’être mis dans une case, surtout que les musiques que je rassemble sont justement inclassables. Je voulais surtout une dimension internationale : je suis arrivĂ© Ă  proposer quasiment 50% d’artistes français et 50% d’internationaux. Aujourd’hui, l’esprit du « hardcore continuum » a dĂ©passĂ© les frontières du Royaume-Uni et ces sonoritĂ©s ont influencĂ© des gens partout dans le monde, j’en suis le premier exemple. Ça me semblait donc important de mettre en avant des artistes liĂ©s Ă  cette scène, sans pour autant en ĂŞtre originaire. J’ai approchĂ© des artistes français que je connais personnellement et qui sont pour moi parmi les plus intĂ©ressants dans la scène française actuelle. Les autres artistes Ă©taient pour la plupart aussi des connaissances, soit ils m’ont envoyĂ© des dĂ©mos, soit je leur ai proposĂ© de faire partie de la compilation en croisant les doigts. Enfin, j’ai voulu garder une unitĂ© tout en laissant une grande variĂ©tĂ© de sonoritĂ©s que j’affectionne : de l’ambient, du club, des morceaux très colorĂ©s, d’autres plus durs, certains minimalistes, d’autres très crasseux. Tout est diffĂ©rent mais se complète, chacun Ă©tant une facette d’un mĂŞme ensemble. Mon seul regret est de ne pas avoir pu mettre d’artiste fĂ©minine sur la compilation, j’y tenais beaucoup car il y a des productrices incroyables avec qui j’aimerais Ă©normĂ©ment travailler, mais je compte bien rectifier le tir par la suite.

« Sortir de la musique qui a pour vocation de faire danser les gens, Ă  une pĂ©riode oĂą les clubs sont fermĂ©s, c’est lĂ©gèrement rageant. »

C’est la situation sanitaire qui t’as permis de te lancer ?

En effet, c’est sĂ»rement la seule chose que le Covid-19 aura eue de positif de mon cĂ´tĂ©. Je travaille dans le secteur de l’évĂ©nementiel musical Ă©lectronique, donc j’ai eu du temps pour monter le projet. J’avais Ă  la fois l’esprit entièrement disponible et une sensation d’ennui immense, la motivation est donc venue rapidement ! Avec du recul, je pense que je n’aurais probablement pas pu lancer ce projet seul aussi facilement si je n’avais pas eu des semaines entièrement libres pour m’y consacrer. Il faut ĂŞtre sur tous les ponts pour que chaque aspect avance, j’avais un peu sous-estimĂ© le travail que ça implique, surtout quand on dĂ©marre par une compilation rĂ©unissant du monde. L’aspect nĂ©gatif de la pandĂ©mie sur le label est que sortir de la musique qui a pour vocation de faire danser les gens, Ă  une pĂ©riode oĂą les clubs sont fermĂ©s, c’est lĂ©gèrement rageant, mais je me dis que les gens ont une plus grande disponibilitĂ© pour dĂ©couvrir de nouvelles choses.

À quoi peut-on s’attendre pour la suite ?

J’ai déjà deux autres sorties dans les tuyaux, je garde le mystère à leur sujet pour le moment, mais ce sont les EPs de deux artistes qui figurent sur la compilation. Le premier est prêt et sortira normalement en juin, le deuxième à la rentrée prochaine. Je suis super heureux de ces deux sorties, car elles vont vraiment dans la direction que j’imagine pour le label. À côté de ça, je réfléchis à organiser des événements pour mettre en avant les artistes du label, on croise les doigts pour que la situation sanitaire redevienne plus stable.

Grid

©Clad

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