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8 mai 2015

Rencontre avec Shamir, la sensation disco-house du moment.

par rédaction Tsugi

Depuis le clip de “On The Regular”, Shamir est sur toutes les lèvres avec son cocktail disco-house rappé-chanté ultra-queer et ultra-jouissif. Son premier album, Ratchet, sort le 18 mai sur le prestigieux label XL Recordings, c’était l’occasion de retrouver le jeune homme, épuisé en pleine tournée promo. Derrière sa voix fluette à peine perceptible et sa passion pour les hugs (il n’accepte rien d’autre qu’un câlin pour dire bonjour et aurevoir, même à un inconnu), on décèle un jeune homme intimidé par ce qui lui arrive, mais charmant par sa candeur.

Tu es en Europe pour une petite tournée de promo (l’interview a été réalisée mi-avril), personne ne te connaissait il y a six mois, qu’est-ce qui te surprend le plus dans cette folle nouvelle vie ?

Je ne sais pas… je viens de parcourir quatre pays européens différents rien que cette semaine, ça c’est fou. Je n’ai le temps de rien d’ailleurs, en dehors des interviews. On me traîne juste dans quelques bons restaurants.

Est-ce que ta famille comprend ce qui t’arrive ?

Pas vraiment, d’ailleurs personne ne jouait ou chantait dans ma famille, il n’y a pas de musiciens, même s’ils aiment la musique. Ma tante écrivait des paroles par contre, elle faisait venir des musiciens à la maison pour jouer et chanter ses chansons. C’est une des premières choses qui m’ont poussé à écrire des chansons je crois.

Tu as grandi à Las Vegas, est-ce que c’est une ville agréable ? Et une ville où l’on grandit facilement comme adolescent gay ?

C’est très normal, bien plus que ce que les gens imaginent, je vis dans une banlieue assez tranquille. Et c’était loin d’être exceptionnel d’être gay dans le coin même si il y a des cons partout. C’est même un endroit assez tolérant, j’étais probablement le mec le moins flamboyant de mon école publique. Il y avait pas mal de gays, quelques personnes transgenres aussi, donc je n’ai jamais vraiment subit de brimades ou quoi que ce soit. 

Comment as-tu commencé à faire de la musique ? C’est ta tante qui t’a mis le pied à l’étriller ?

Non j’écrivais toujours de petites chansons pour moi tout seul sans savoir jouer de quoi que ce soit. A 9 ans j’ai demandé une guitare à ma mère et j’ai commencé à composer comme ça. Je ne voulais pas vraiment chanter je voulais vraiment écrire des chansons. Vers 13 ans les chansons ont commencé à être un peu plus substentielles. L’une des premières qui a un peu capté l’attention de mon entourage c’était The Devil’s Bride, l’histoire d’une femme qui tue son homme.

Pour quelles raisons ?

Aucune ! J’avais 13 ans (rires).

A l’époque c’était quoi tes artistes préférés ?

The Slits, Daniel Johnston… et Taylor Swift, je l’ai découverte quand je devais avoir 12 ou 13 ans et elle a beaucoup compté pour moi.

Tu parles de The Slits, tu étais toi-même dans un groupe de rock avant. Comment en es-tu venu à la house ?

Ca s’est fait naturellement. On a fait une pause avec le groupe de punk parce que je venais de finir le lycée, on avait moins de temps pour répéter etc. Après avoir sorti notre cassette, on a décidé de consacrer l’été 2013 à autre chose et d’essayer d’autres projets. Mon side project s’est avéré être ça, mon album ! Le groupe s’appelait Anorexia et j’en suis toujours très fier aujourd’hui, je crois que c’est encore de loin ce que j’ai fait de mieux (pas sûr, ndlr).

Et donc, pourquoi la house ?

Je n’écoute toujours pas vraiment de house en fait, je n’en ai jamais vraiment écouté. J’écoute beaucoup de pop, Marina and the Diamonds ou Cocknbullkid et de goth-pop, Austra, Zola Jesus… Ce que je voulais c’était ouvrir une nouvelle voie dans la pop, faire mon propre truc avec ma drum machine. Et puis ça s’est mis à sonner comme de la house… complètement par hasard (rires). 

Tu t’es intéressé par la suite à l’histoire de la house, son importance pour les noirs et les homosexuels ?

Nick (Sylvester, patron du label Godmode et producteur de l’album) m’en a pas mal parlé, c’est un gros gros fan de house. Mais franchement je ne m’y suis pas intéressé plus que ça. 

Tu ne clubbes pas ?

Jamais ! Et je sors à peine de toute façon. Il y a plein de clubs à Vegas évidemment mais tu ne peux pas y entrer quand tu n’as pas 21 ans. Je crois que je ne suis jamais allé dans un vrai club ! Quelques soirées de potes parfois c’est tout.

Tu dis que tu n’as jamais peur de jouer en live. Il paraît pourtant que les premiers concerts avec ton groupe de rock ne s’étaient pas bien passés.

Une horreur, on s’est fait jeter des bières à la gueule, c’était une catastrophe. On avait 16 ans, c’était dans un bar, c’était avec l’ancienne chanteuse du groupe Anorexia, Evelyne, qui a complètement flippé et s’est figée sur scène. C’était le flip de ma vie. C’est probablement pour ça aujourd’hui que je n’ai pas peur sur scène, j’ai déjà touché le fond, aucune performance ne sera aussi catastrophique (rires). Ensuite Evelyn a quitté le groupe, j’ai eu un deuxième concert à faire alors j’ai demandé sur facebook si quelqu’un voulait monter sur scène avec moi, même si c’était pour jouer du triangle. Je ne pouvais pas le faire tout seul avec ma guitare et ma drum machine. Christina s’est proposée et le groupe a continué comme ça. Le deuxième concert était top

Même le live au Grand Journal était une bonne expérience ? C’était ta première télé, certains comme FKA Twigs disent que la télé et les lumières volent son énergie et aspirent un peu sa substance.

C’est profond ça (rires). Tout me bouffe mon énergie, les gens, les shootings, les interviews tout. Mais au lieu de voir ça de façon négative je positive, comme toujours. Et c’était mortel cette télé, je m’étais éclaté.

Avant de signer sur XL, il y a eu Godmode, chouette petit label de Brooklyn, qui a publié ton premier EP. Comment la connexion s’est-elle faite ?

J’ai envoyé un email à Nick, parce que j’avais découvert Godmode via le groupe Yvette. On a échangé pas mal pendant quelques mois, il m’a fait venir à New York en janvier 2014 et on s’est mis au boulot tout de suite.

On a l’impression que tout est allé un peu vite jusqu’à ce premier album.

Tout se passe vite, mais c’est surtout que je n’ai jamais vraiment prévu de faire cet album, on faisait simplement beaucoup de musique, on travaille très vite. On est déjà sur le deuxième d’ailleurs ! En général je commence quelque chose avec la guitare ou un truc très brut sur ma drum machine. J’envoie ça à Nick et ça marche assez facilement comme ça. 

Tu as l’air émerveillé par ce qu’il t’arrive. Quels ont été les meilleurs moments ?

Tellement de choses… Mon premier concert, à Brooklyn, dans une salle absolument bondée, avec des gens qui connaissaient déjà mes paroles ! Plein de gens qui ont dit plein de choses sympas sur moi. J’ai rencontré Marina & The Diamonds, je me suis approché en vraie fan girl, bavant à moitié. Et avant que je puisse sortir un mot elle me voit elle me dit “Hi hi howdy howdy hi hi” j’étais fou, elle me connaissait, elle connaissait mes paroles (c’est le début de “On The Regular”, ndlr). Je ne serais sûrement pas là si elle n’avait pas été là, elle est une influence fondamentale sur moi.

Est-ce que cette agitation autour de toi a de mauvais côtés ?

Être là par exemple, je suis crevé (il s’affale sur le canapé, ndlr). Et surtout je n’ai pas le temps de faire de la musique comme je l’aimerais, j’ai l’impression de passer plus de temps à promouvoir ma musique, à en parler, qu’à en faire. Nick est avec moi ici mais on n’a pas le temps de faire quoi que ce soit.

L’album est majoritairement euphorique. Quels sont ces moments plus sombres ?

C’est la musique qui est euphorique, pas les paroles. Le morceau “Darker” parle de la mort. “Vegas” parle du côté sombre de cette ville, du fait de grandir dans un endroit qui s’intéresse plus à ses visiteurs de passage qu’à ses habitants. “Demon” est une des plus mélancoliques, c’est l’histoire d’un mec qui me manipule pour apparaître comme le salaud dans une histoire alors que c’est lui… mais aussi du fait que je passe outre parce que j’avais simplement envie d’être avec lui.

Tu as le potentiel, en image, peut-être un jour en musique, de faire un pas dans le mainstream. Ca te tente ?

Non pas du tout, ça me fait très peur honnêtement. Ca n’a jamais été le but, même si j’ai un grand faible pour la pop musique. Je suis un énorme fan de pop bizarre mais j’aime aussi la pop mainstream, Taylor Swift donc, parce qu’elle est honnête… et j’adore Pink !

Vraiment ? Ce n’est pas la pire des pop stars ?

Tu te fous de moi !?! QUOI ?!? Elle a une voix incroyable, elle est passée du R&B au pop-rock. Je l’écoute depuis que je suis tout petit, elle est géniale, elle a tant changé de style, ça me touche. J’aime aussi Jhene Aiko, Amerie, -le tout premier single que j’ai acheté c’était “1 Thing”, Rihanna etc. Et j’aime aussi Beyoncé mais je crois que ce n’est même pas nécessaire de le dire encore, si ? (rires)

Propos recueilis par François Blanc

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