Un album, deux avis. Aujourd’hui sur le ring, le nouvel album du duo Polo & Pan, Cyclorama. Fight !
Article issu du Tsugi 141 : 18 ans d’Ed Banger, en kiosque et en ligne.

Patrice Bardot

Comme l’affirmait en son temps d’un air grave l’illustre Roger Gicquel: «La France a peur. Je crois qu’on peut le dire aussi nettement. Oui, la France a peur et nous avons peur, et c’est un sentiment qu’il faut déjà que nous combattions.» Peur du virus, peur des variants, peur de l’autre, besoin de réconfort, de tendresse, de plats régressifs… Mais tout ceci n’excuse en rien que l’on se transforme en bisounours, en Fluff sur pattes ou en adepte de la câlinothérapie. Car oui, la France souffre. Elle souffre aussi d’avoir succombé au côté doudou de la musique électronique, à la «deep forestation» des formats, aux mélodies gentillettes et, affirmons-le, à la niaiserie arborée avec fierté. Assez de couchers de soleil, d’épaule contre épaule et de baisers volés en se regardant avec l’œil torve de l’ovin qui vient de naître. On n’est pas dans La Boum 2 que diable. Soyons honnêtes, nous n’avons rien contre Polo & Pan, qui produisent sans doute aucun leur musique avec honnêteté, sans calcul – le remix de leur «Gengis » par Red Axes en 2019 avait trouvé à de nombreuses reprises le chemin de nos enceintes. Mais voilà , célébrer comme ici « l’esprit » des années 1970, sa légèreté, ses dessins animés, ses mélodies cul-cul ou son disco light passé à la moulinette de la béatitude, n’a jamais fait partie de nos fantasmes. C’est oublier un peu vite les pulls en lycra et la couleur orange mise à toutes les sauces. Alors oui, Cyclorama est joli, on y retrouve de vieilles lunes comme Pierre Richard, le fantôme de l’immense François de Roubaix (et un titre réussi en la personne de «Tunnel », avec Channel Tres aux vocaux), mais se fader quatorze titres d’une pop easy-listening délavée nous réjouit autant qu’un plat de navets bouillis. On dit toujours que si on n’aime pas quelque chose, il ne faut pas en dégoûter les autres. À en croire le succès de Polo & Pan, les autres vont aimer. Grand bien leur fasse.
Benoît Carretier
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