Kompromat, FKA twigs, Terrenoire… Les sorties de la semaine
Envie de nouveautés pour vos playlists ? On continue de dérouler ce mois de janvier bien fourni en sortie : voilà FKA twigs, Kompromat, Terrenoire, Solann, Victor Solf, OJOS, Zero gr4vity, Jeshi, Walter Astral. Mettez vos casques, c’est parti.
Par Oumeyma Aouzal et Siam Catrain
FKA twigs – EUSEXUA
EUSEXUA, le nouveau BRAT ? Le tant attendu dernier album de FKA twigs ne sera peut-être pas la tendance de l’hiver 2025. Problèmes de santé, violences psychiques et sexuelles infligées par son ancienne relation, vol de chanson… les presque six ans qui séparent EUSEXUA de Magdalena ont été marqués par des expériences intenses, forgeant ainsi un univers tout nouveau. Ce monde est inspiré de ses déambulations dans les raves de Prague. D’où ce titre, ‘EUSEXUA’, un terme composé par FKA twigs pour exprimer l’érotisme de l’euphorie commune de la piste de danse.
L’album se présente comme une purgation des passions charnelles et cérébrales. Ce sentiment intrinsèquement humain, contraste avec la voix robotique et plaintive de FKA twigs, appelant à l’aide. Les sonorités sont électriques, d’un autre monde (sûrement celui de Koreless, le producteur de LP). Les émotions sont quant à elles déchirantes, d’une folie terrienne. Le EUSEXUA Winter (s’il s’impose) n’aura sans doute pas le visage du BRAT Summer.
Kompromat – PLДYING / PRДYING
Depuis le troublant premier album de Mansfield.TYA, on a pour habitude de tout accepter de Rebeka Warrior : elle pourrait chanter du Kyo sur les beats criards de Tiësto, que l’on serait fichu de trouver sa voix bouleversante, sa proposition moderne. C’est toutefois sans exagération aucune qu’il est possible d’affirmer l’importance d’un album tel que Traum und Existenz (2019), l’œuvre inaugurale de Kompromat, le genre de projet né d’un besoin viscéral de se renouveler, d’envoyer les normes dans les cordes, de s’amuser de références communes – rappelons qu’avant la sortie du single ‘Niemand‘, Vitalic et Rebeka Warrior avaient d’abord fait leur fête à Sophie Ellis-Bextor (‘La mort sur le dancefloor‘, 2012) et Alizée. (…)
La suite de la chronique par Maxime Delcourt, à lire dans le Tsugi 177
Solann – Si on sombre ce sera beau
Après l’onde de choc provoquée par son premier EP Monstrueuse, Solann revient avec un album : Si on sombre ce sera beau. Sa plume tranchante et son univers à fleur de peau ne fait que confirmer ses nominations aux Victoires de la Musique. Et on aimerait revivre encore ce moment suspendu en sa compagnie, cet été au milieu des arbres, au festival Nuits Secrètes.
Ce premier opus est un véritable tour de force. Chaque titre creuse les paradoxes : l’amour qui consume (‘Insomnie’), les colères qui libèrent (‘Comme les animaux’), ou encore la fragilité dans la lutte (‘Les draps’). Les mélodies oscillent entre la douceur du ukulélé et des nappes électroniques, traduisant la tension entre vulnérabilité et force.
Terrenoire – protégé.e
Rares sont les projets musicaux français qui vous attrapent dès les premières notes. Ce fut le cas pour moi/nous en entendant ‘Le silence’ du duo Terrenoire en 2018, première chanson du premier EP, qui renfermait déjà ce qui fait et fera la force du duo : une évidente tendresse, déjà. Mais également un goût pour le majestueux et les textes directs. Quand ils parlent d’eux, ils parlent de nous. Sept ans plus tard, après une merveille d’album (Les Forces contraires, 2020) et la consécration qui lui était due, les frères Herrerias reviennent avec 14 titres qui forment leur nouvel album, protégé.e.
La première chanson créée pour ce nouveau disque fut, comme un symbole, ‘pleurer devant la beauté‘. Le message est clair et bien reçu : la voix, le souffle et le corps seront les personnages principaux de ce disque. Corps objet de désir, corps creusé par les années ou la maladie, corps libéré ou étouffé dans la grande ville. Corps en transformation, protégé ou au contraire soumis à l’anxiété de l’époque. Les chansons de Terrenoire recèlent le banal et le grandiose qui fabriquent le quotidien… Presque toujours bousculé par l’autre, la société, par les événements intimes ou politiques. On y savoure le minimalisme du piano jusqu’aux voix tout en puissance et théâtralité (…)
Chronique par Corentin Fraisse, extraite du Tsugi 177 et à retrouver en entier ici
Victor Solf – Tout peut durer
Victor Solf a longtemps emprunté les codes anglo-saxons comme une armure. Né à Düsseldorf en Allemagne, il façonne sa musique, rêvant d’une pop universelle sans frontières. Mais avec Tout Peut Durer, son nouvel album, il troque les certitudes pour une vérité plus nue : le français.
Dans cet album, il déploie une écriture épurée, des textes aussi tranchants que délicats. Des mélodies minimalistes où chaque silence compte, soutiennent des histoires intimes, entre gravité et légèreté. Pour donner vie à ces morceaux, Victor s’entoure de choristes gospel, cuivres fiévreux, arrangements peaufinés avec une obsession presque maniaque. Tout est pensé, trituré, reconstruit, mais l’ensemble respire la liberté. Entre groove et retenue, entre passé et futur, Tout Peut Durer refuse les étiquettes et réinvente la soul. À la française, donc.
Ojos – OUI FUTUR
Dans un monde où grandir est une bataille, Ojos choisit de crier, chanter et susurrer ses doutes avec OUI FUTUR. Un album où chaque titre est un fragment d’âme, brut et sans filtre. Des mélodies sombres en français et en espagnol, des mots taillés au scalpel : Élodie Charmensat et Hadrien Perretant, architectes de cœur et de son, construisent ici un véritable manifeste pour les égarés.
Il y a des morceaux qui explosent, ‘Adieu’ et ‘Krkrkr’, d’autres qui caressent comme ‘Je dors tout le temps‘. Entre hurlements viscéraux et murmures fragiles, chaque note transpire l’urgence de dire l’amour, la désillusion, l’émancipation. Et si parfois la pop s’habille de légèreté, Ojos l’enrobe ici d’une intensité qui bouscule.
Zero Gr4vity – Warm And Lovely (EP)
Zero Gr4vity, c’est le projet solo de Johann Guillon, membre de l’éclectique groupe dub EZ3kiel. Ici trip hop, jungle et musique orchestrale sont mis de côté pour développer dans l’EP Warm And Lovely une électro-ambient parfaitement maitrisée. Peu étonnant lorsque l’on connait les noms de ceux qui l’inspirent : Jon Hopkins, Max Cooper, Niels Frahm et Richie Hawtin.
La mécanique de l’EP fonctionne de la même façon qu’un vinyle : sur la face A (ici, la face dub) une ambiante organique et spatiale monte en intensité grâce à une accumulation de textures synthétiques. Sur la face B, une électronique envoutante nous fait descendre dans les sous-sols d’un club à l’aide de nappes sonores hypnotiques.
Jeshi – Airbag Woke Me Up
Walter Astral – Éclipse
Dans l’obscurité de l’espace et l’éclat du soleil, Walter Astral tisse une épopée musicale qui défie les frontières du temps et de l’espace. Avec Éclipse, premier long-format, Tristan Thomas (alias Zaspéro) et Tino Gelli nous emmènent dans un voyage cosmique entre la lumière du jour et les ombres de la nuit.
Chaque morceau est un fragment d’univers : de la folk planante à la techno tripante, en passant par des basses acides et des riffs psyché, tout est là pour faire vaciller la réalité et dévoiler l’invisible. L’album se déploie comme une exploration, de l’aube au crépuscule, chaque morceau soulignant un passage, un changement. Direction cosmos, aucun retour possible, embarquement immédiat.
Laura Cahen – De l’autre côté
Après avoir marqué les esprits avec ses deux premiers albums Nord et Une Fille, ainsi qu’un élégant EP collaboratif (Des Filles, aux côtés de Jeanne Added, d’Emel Mathlouthi ou de Juliette Armanet), Laura Cahen confirme son statut d’incontournable de la scène pop et de la chanson française. Elle poursuit en 2025 son aventure musicale avec un nouvel album, De l’autre côté.
Premiers éclats de cet opus, la chanson ‘Quitter la ville’ se fait le miroir d’un désir ardent de fuir, une urgence viscérale qui se déploie sur fond de préoccupations écologiques. Une brûlure douce et engagée, à laquelle répondent ‘Les astres’, une ode à l’abandon et au lâcher-prise, et ‘Partout’, une pièce envoûtante où se dessinent les contours d’un voyage intime. Avec De l’autre côté Laura Cahen s’ouvre à un nouvel univers où les émotions s’entrelacent à une écriture ciselée et des arrangements vibrants, confirmant son talent pour capturer la beauté des instants fugaces.