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22 juillet 2015

Rencontre avec Talaboman, l’incroyable duo formé par John Talabot et Axel Boman

par rédaction Tsugi

Le premier soir du Peacock Festival, Talaboman passait sur l’une des deux mainstages. On a sauté sur l’occasion pour aller à la rencontre des deux DJs qui forment ce duo désormais incontournable. D’un côté, le solaire John Talabot qui a su s’échapper du gigantesque Razzmataz pour embrasser une carrière prometteuse et de l’autre, Axel Boman le scandinave qui sonne comme un méditerranéen. Avec eux la formule est plutôt simple: réunissez ses deux copains pour une interview décontractée juste avant un DJ Set et vous serez assurés de les voir bavards et détendus comme jamais.

Comment vous êtes vous rencontrés ?

Axel: C’est par Petter Nordkvist, qui travaille avec moi sur Studio Barnhus.

John: Oui, j’adorais ce que Petter faisait..

Axel: Et maintenant, tu n’aimes plus ?

John: Si si j’adore toujours autant mais quand il a sorti Six Songs EP j’étais là: « waouh ce mec est vraiment le meilleur. »

Axel: Mais il était très jeune à ce moment là, je crois que c’était en 2004 et il tournait beaucoup en Europe après la sortie de son super hit « Some Polyphony » et vous vous êtes rencontrés en Espagne.

John: Oui je me souviens, il jouait en live à cette époque et du coup on a pas mal discuté ce soir là et il me parlait de toi.

Axel: Et après on s’est finalement rencontrés à Sonar, on buvait des bières et il nous a introduit mais je ne connaissais pas grand chose à propos de toi et lui me disait « c’est le meilleur DJ de Barcelone ». A cette époque tu étais résident au Razzmataz et donc voilà comment on s’est rencontrés.

Quel est votre souvenir le plus mémorale ensemble ?

John: Celui sur le bateau !

Axel: Ah oui…la semaine dernière on a joué à une boat party ensemble sur la mer adriatique pour le Garden Festival. Normalement, c’est comme toutes les boat party, vous sortez et vous regardez le coucher du soleil avec la musique en fond et puis vous rentrez. Mais là une heure après le début quelqu’un a crié  » Regardez ! Il y a des dauphins! » et en effet il y avait des dauphins qui suivaient le bateau. Il y a quelque chose de magique qui se passe quand les gens voient des dauphins, ils deviennent vraiment contents. Alors après ça, la soirée était certainement la plus folle de tous les temps. On a même passé « Sail Away » d’Enya et tout le bateau chantait en coeur.

John: C’était fou, le sol tremblait et on pensait vraiment que le bateau allait finir par couler et qu’on allait mourir.

 Alex: Oui, on aurait pu mourir sur ce bateau survolté mais au moins cela aurait été une très belle fin.

John: Il y a aussi la fois ou on a joué pendant 10 heures à Berlin, c’était très intense comme exercice.

Alex: Personne ne partait, on a vraiment senti une connexion avec toutes les personnes présentes.

John: En fait on aurait pu continuer plus de dix heures mais on a décidé d’arrêter parce qu’on était très fatigués.

En parlant de longs DJ Set, avez-vous une technique particulière pour tenir le cap ?

Axel: Fumer 100 joints avant ? (rires)

John: Parfois ça marche, parfois ça ne marche pas. Ca dépend de la foule mais par exemple à Berlin c’est plus facile de faire en sorte que les gens restent car ils sont habitués à ce genre d’horaires à rallonge. Ils savent que la nuit peut être longue et même parfois se prolonger jusqu’en journée. Dans d’autres pays, ils ne sont pas autant habitués et ils peuvent se sentir fatigués rapidement ou juste préférer partir tôt. 

Axel: Ca doit être quelque chose qui s’improvise car si tu programmes trop à l’avance ça se ressentira et ce ne sera plus très naturel.

John: Ce dont on a vraiment besoin c’est d’un point de départ. De ce point, on construit les choses. En fait on parle toujours de comment on va commencer mais jamais de la manière dont on va conclure le set.

Comment travaillez-vous ensemble ? Avez-vous besoin d’être dans le même studio ou pouvez-vous travailler à distance ?

John: Quand on a commencé Talaboman l’idée première c’était d’être ensemble en studio. Parfois ça peut arriver qu’on s’envoie quelques samples qui nous plaisent mais on essaye vraiment de faire le maximum du travail de création ensemble. Je pense que si Axel faisait un morceau seul de son côté, ça aurait beaucoup de « Boman » et pas beaucoup de moi. Et c’est la même chose si c’est moi qui compose seul de mon côté. La musique qu’on fait ne sonne pas comme la sienne ou la mienne mais comme un mélange de nous deux. Axel a ce côté plutôt méditerannéen, presque baléaric, qui fait qu’on se complète vraiment bien tous les deux.

Axel: Je suis vraiment très excité à l’idée de retourner en studio avec John. La dernière fois, comme on savait qu’on ne retournerait pas en studio ensemble avant un long moment, on s’est donné des devoirs à faire, comme à l’école, genre « tu dois faire ça, et ça et ça » et en octobre on va enfin pouvoir travailler ensemble sur ce qu’on a fait chacun de notre côté.

Vous parlez d’une session d’enregistrement en octobre…est-ce que vous allez travailler sur un album ?

John: On a besoin de voir comment ça va se passer et quels morceaux on va choisir à la fin parce que pour le moment on a tout un tas d’idées mais peut-être qu’on ne sera capable d’en finir proprement seulement trois ou quatres.

Axel: Et peut-être que c’est mieux de ne garder que le meilleur même si c’est en petite quantité. De toute façon on a une tonne de matières à exploiter et un processus créatif ouvert donc on verra bien où cela nous mènera.

Quel est le meilleur endroit pour mixer selon vous ?

John: Le bateau de la semaine dernière, on se répète mais c’était complètement dingue !

Axel: Franchement si on pouvait faire la même à Hawaï, je pense que ce serait parfait. Avec du hula, des filles, les tropiques…le cadre idyllique. Mais j’ai aussi un rêve depuis longtemps qui serait de jouer en Suède, dans le nord du pays lors d’un hiver très froid pour une « Mid Winter Rave ». Tout serait complètement blanc et gelé et j’aimerais réussir à amener de la chaleur, à faire tout l’opposé du climat avec ma musique. Les gens danseraient comme des robots parce qu’ils devraient tous porter des grosses doudounes pour supporter le froid, ce serait génial !

Quelle est la meilleure découverte musicale que vous ayez faite cette année ?

John: Cette année, ce serait aucun doute le nouvel EP de Colleen. J’avais déjà écouté quelques morceaux avant mais avec ce nouveau disque très hypnotique j’ai vraiment accroché.

Axel: Pour moi ce serait le nouvel album de Felix Laband, sorti chez Compost mais qui ne sonne pas du tout comme un disque de la maison. L’album est plein de richesses et il y a un morceau que j’aime énormément qui est « Ding Dong Thing », une fois que vous l’avez entendu ce sera difficile de ne pas l’écouter en boucle. D’ailleurs, il reprend le sample de « These Day » de Nico et c’est tellement stupide finalement de voir comment on peut reprendre le sample d’une chanson iconique et en faire quelque chose qui marche vraiment. Tu t’attends à ce que soit « cheesy » parce que c’est super connu mais quand tu l’écoutes tu découvres un autre truc avec des rythmes africains, c’est juste hallucinant !

Axel, lors de ton passage sur la radio WNYU pour l’émission Beats In Space, tu as révélé le remix de « Loud Places » qu’à fait John Talabot. Pourquoi l’avoir diffusé ?

Axel: John m’avait fait écouter ce remix quand on bossait ensemble en studio et je l’ai trouvé tellement bon que je lui ai demandé si c’était possible de le passer lors de l’émission. John était d’accord mais il ne voulait pas que je donne trop d’infos et puis  normalement ce genre de remixes passe inaperçu à la radio car personne ne fait très attention. J’ai passé ce morceau en dernier sans dire grand chose dessus et le lendemain Tim Sweeney m’envoyait un lien en me disant « Regardes ce que quelqu’un a fait. » Une personne avait repris l’enregistrement en le découpant pour isoler le remix et après ça la machine était lancé, Pitchfork en a parlé et tous les autres médias ont suivi…Et j’élais là « oh merde je vais avoir tellement de problèmes ».

John: Non c’est moi qui vais avoir des problèmes (rires) Je veux dire…je ne m’attendais pas à ce que quelqu’un récupère le morceau mais bon c’est arrivé, tant pis. Je suis sûr que Jamie est ok avec ça, il est cool et il s’en fout un peu de toute façon…

Vous êtes de deux pays différents avec des cultures singulières et pourtant on retrouve une certaine homogénéité dans vos travaux respectifs. Comment l’expliquez-vous ?

John: Ah ça c’est parce qu’Axel est méditerranéen mais il ne le sait pas!

Axel: Et lui ne sait pas qu’il est scandinave! Il a vraiment une approche très « scandinavian touch », comme nous il a une très forte tradition des mélodies et de la composition. Regardez les autres DJ de Barcelone, il n’est comme aucun autre. 

John: J’ai vraiment ressenti une forte connexion avec Axel parce que j’ai aimé la manière dont il construit de nouvelles choses à partir de samples. Mais avant de penser à lui pour travailler sur mon DJ Kicks, j’avais en tête de travailler avec Alexander Berg de Genius Of Time mais qui évolue aussi sous le pseudo Dorisburg. C’est un producteur incroyable un peu nerd sur les bords qui a de très grandes connaissances sur les synthétiseurs.

C’est un peu votre gourou musical , non ?

John: Non, ce n’est pas mon gourou parce que je ne serai jamais capable de faire ce qu’il fait. Il est tellement à fond dans les synthétiseurs et comprend totalement toute la mécanique derrière.

Axel: En fait la plupart des gens qui s’y connaissent bien en synthés ne sont pas forcément les meilleurs producteurs mais Alex s’y connaît réellement bien et il a un univers particulier dans lequel il met en pratique toute sa connaissance. Il a des idées très spécifiques sur ce que la musique devrait être à un niveau presque philosophique. Mais il est aussi super amical, je suis sûr que si tu l’appelais maintenant il resterait au téléphone des heures pour parler musique.

John: Aujourd’hui, il y a eu un super article de Resident Advisor à son sujet, il faut vraiment le lire pour bien comprendre son projet Dorisburg. Bref, tout ça pour dire que j’avais la possibilité de travailler avec l’un des deux et j’ai finalement choisi Axel parce que j’avais senti quelque chose qui s’est confirmé par la suite quand on est entré en studio et qu’on est devenus amis. Je jouais souvent son morceau « Lovebirds » en ouverture de mes sets depuis un an, j’étais fasciné totalement par son travail.

Vous avez une petite idée du style de votre set de ce soir ?

John: Ben en fait on devrait commencer à en parler maintenant…

Axel: Oui, il faudrait qu’on aille voir l’ambiance dans la salle mais je crois que Ryan Elliot passe avant nous et qu’on sera suivi par Seth Troxler en back to back avec Michael Mayer alors c’est clair qu’on ne pourra pas faire un set disco.

John: Je pense qu’on va aller vers quelque chose de plus tech house et improviser au fur et à mesure.

Axel: Ce sera du Talaboman un peu plus foufou!

John: C’est ça qui est cool dans les B2B, chacun a son idée du set et ça fait des mélanges intéressants mais il faut se connaître suffisamment l’un l’autre pour être fou tout en restant sous contrôle.

Axel: Je ne veux pas sortir un gros cliché mais c’est bel et bien une histoire de confiance, si tu crois en l’autre tout se passera bien…

John: L’autre jour quand on jouait sur le bateau avec tous les autres, ça avait beaucoup de sens et ça ne semblait pas du tout désordonné, même quand on a passé Anya c’était totalement logique.

Ce soir-là, malgré une coupure de courant survenue alors qu’ils commençaient à être très à l’aise devant la foule parisienne, les deux compères ont réussi à placer le fameux remix de « Loud Places » et ont surpris un public toujours très exigeant avec un set audacieux. D’ailleurs, on a cru entendre que John Talabot avait d’autres remixes de ce même titre et qu’il ne tarderait pas à les partager. Quant à Axel Boman, il vient tout juste de sortir un EP sur Pampa Record qu’on vous propose d’écouter ci-dessous.

En bonus, une photo des deux copains de Talaboman en compagnie de Kornél Kovács (à gauche) et de Leo Forsell (à droite) juste avant d’embarquer pour la fameuse sortie en mer où ils ont eu la chance de croiser des dauphins.

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