RONI, Flavien Berger, Yamê… Les sorties de la semaine

par | 13 06 2025 | chronique

RONI – celestial | Flavien Berger – plouf!

Quel mois de juin ! Cette semaine encore, Tsugi vous déniche les sorties à ne pas manquer pour profiter de ce chaud week-end. Au programme : RONI, Flavien Berger, Yamê, The Cure, Lyra Pramuk, James Loup, Isha, Thee Diane Annahstasia, Sam Binga, Ruthee…

RONI – celestial

Même si son nom circule depuis quelques années, c’est bien le premier EP pour la Parisiano-Malaisienne. RONI voit les choses en grand avec neuf tracks dont quatre remix. Cette techno qui va relativement vite s’avère très inventive, concernée avant tout pour le dancefloor, l’apport de gimmicks vocaux (« amethyst » ou « celestial ») poussant à une trance tropicale. Avec Ma Sha sur « rhiza », la productrice signe un track étincelant. Notre préféré.

une chronique de Patrice Bardot à retrouver dans le numéro 181 du Tsugi Mag

Flavien Berger – plouf !

Flavien Berger sortait Léviathan, son premier album, il y a dix ans tout pile. Balades amoureuses et virées sous-marines, ce disque éclaboussait la pop à la française de son talent. Pour fêter l’anniversaire, voilà une version revisitée des titres construits une décennie plus tôt. Pour cette épopée, Flavien a reçu l’aide de La Brume, formation instrumentale hautement talentueuse, qui donne aux chansons initiales de nouvelles couleurs. Plus qu’une réédition, c’est une reconstruction entière qui ferait désormais passer Léviathan, l’œuvre originale, pour une ébauche incomplète. Comme un prototype de plouf!

Corentin Fraisse

Yamê – ÉBĒM

À peine deux ans après son disque ELOWI jonché d’excellents titres comme « Quête », « Ayo Mba » et « Bécane », Yamê est de retour avec un nouvel album. C’est un projet complet, immersif et solide fait de 14 chansons. L’album est accompagné d’un court-métrage animé de 12 minutes où le ‘bantu bionique’ dévoile encore de nouvelles facettes. Aussi fort et aventureux qu’en live, Yamê impressionne avec ses idées plein la tête, ses expérimentations sonores et sa technique vocale irréprochable.

Corentin Fraisse

ISHA – Drôle d’oiseau

Dans le monde impitoyable et frénétique du rap contemporain, les certitudes sont rares. ISHA lui, fait l’unanimité. Après la trilogie La Vie Augmente et le fracassant Bitume Caviar avec Limsa, le rappeur bruxellois revient avec Drôle d’Oiseau, un album court mais dense, pudique et magnifiquement désabusé. Porté par les prods élégantes de LILCHICK, H Jeune Crack, Horaze ou Herman, ce disque confirme la singularité d’un rappeur qui parle vrai, loin des poses et du bruit.

ISHA y creuse sa veine mélancolique, entre punchlines à retardement et souvenirs incrustés. Sa vie de trentenaire, il la partage avec à ses côtés Green Montana et Dinos pour des featurings sobres et sentis. Neuf titres, pas un de trop. Coeur sur « F*ck le mainstream ».

James Loup – 50% POUR MAMAN

Si on a l’habitude des photos d’artistes pendant leur enfance pour leur pochette, on a rarement l’occasion de rencontrer leur maman à cet âge. Pas chez James Loup. Sur 50% POUR MAMAN, il affine encore un peu plus une signature sonore hors-cadre, entre mélancolie vaporeuse et storytelling d’un mec aussi normal que tourmenté. Le rappeur lyonnais, révélé par Nouvelle École et cofondateur du collectif Impulsion, signe ici un troisième EP. On l’avait croisé sur d’autres projets au près de Navy, Ushi, mais aussi Dany Dan. Cette fois on le retrouve seul au coeur de la maison familiale. De là, il construit son monde incisif et vrai, pour faire sûrement éclore un album l’année prochaine. (Merci Maman)

Folamour – Movement Therapy

Au tournant des années 1990 et 2000, les soirées Body & Soul à New York ont quasiment inventé un courant musical, ou en tout cas l’ont formalisé : une house spirituelle parlant aussi bien au corps qu’à l’esprit, sur laquelle des danseurs, souvent en transe, suaient à grosses gouttes, sourires béats et bras en l’air, dans ce qui s’apparentait à une forme de clubbing sain. Ça commençait le dimanche après-midi, on n’y servait pas d’alcool, quant à la drogue, elle se résumait le plus souvent à un peu d’herbe.

Quelque chose (la musique, pas l’herbe) auquel on pourrait penser en écoutant le cinquième album de Folamour, qui réunit basses amples et puissantes, héritages disco et mélodies soulful qui serpentent et s’envolent. Son disque le plus house, assurément. Il n’y a, en fait, pas un morceau sur lequel on ne pourrait pas avoir envie de se dégourdir les jambes. Un album dansant donc, mais pas de ceux qui donnent l’impression d’être limités au dancefloor, ou tout du moins de perdre en intérêt sorti d’un club. Plutôt de ceux qui invitent à danser partout où ils résonnent, seul ou à plusieurs. C’est après tout le thème du disque : la thérapie par le mouvement et ça fonctionne bien.

une chronique de Gérome Darmendrail à retrouver dans le numéro 181 du Tsugi Mag

Buscabulla – Se Amaba Así

La folie reggaetton ferait presque oublier la multiplicité des musiques latines. Également venu de Porto Rico, le duo Buscabulla propose ainsi un contre-pied bienvenu. Après des années passées à New York, le couple formé sur scène et à la ville par Raquel Berrios et Luis Del Valle était revenu sur l’île suite à l’ouragan Maria en 2017. En résultait un premier album, Regresa, en 2020, qui lui a valu un succès mondial et même — presque ironiquement — un duo avec la star du reggaetton Bad Bunny.

Ce successeur reflète ce changement de statut, avec une production bien plus ambitieuse, notamment sur l’intégration des synthétiseurs. Partant à chaque fois de rythmes latins, de la salsa au batchata ou au merengue, le duo en tire une pop teintée de nu-soul où s’intègre habilement house, disco ou rock psyché. L’envie d’élargir leur public est indéniable, mais sans négliger le travail d’atmosphère.

Malgré le groove de certaines pistes (« Miraverahí, « Te Fuiste ») ou l’envie de pur tube pop (« El Camino »), l’album développe une ambiance intimiste et introspective. L’exploration des relations amoureuses permet même à De Valle d’assurer le chant lead sur deux pistes, dont la réussie « El Empuje ». Mais c’est bien la voix de Berrios qui incarne la douceur intemporelle de ce disque, en particulier sur la fin avec « Mi Marido » ou « De Lejito ». Loin d’un repli sur soi, la réflexion devient une célébration.

une chronique d’Antoine Gailhanou à retrouver dans le numéro 181 du Tsugi Mag

The Cure – Mixes of a Lost World

Cette année, The Cure a tout simplement décidé d’ouvrir sa discographie aux plus beaux noms de la musique rock et électronique. Chino Moreno des Deftones, Daniel AveryFour Tet, Shanti CelestePaul Oakenfold, Orbital, Mura Masa, Sally C ou encore Mogwai… font des hits de The Cure 24 nouveaux tubes à écouter en boucle aussi bien sur son canapé que sur un dancefloor. Il fallait d’autres raisons d’écouter ce chef-d’œuvre électronique de ce groupe rock ? Non, mais les droits d’auteur Mixes of a Lost World seront reversés à l’organisation caritative War Child UK. Un double beau geste.

Annahstasia – Tether

Sous le soleil de Los Angeles, Annahstasia Enuke s’est parée de multiples casquettes : chanteuse, compositrice et artiste visuelle. Repérée dans V Magazine, Dazed ou L’Officiel, elle s’était révélée avec Sacred Bull en 2019, avant d’ouvrir pour Lenny Kravitz lors de sa tournée européenne. Sur son nouveau projet Tether, elle approfondit une folk incantatoire et charnelle, fruit d’un enregistrement live aux Valentine Studios. Sa voix, à la fois dépouillée et souveraine, traverse ce disque comme une brise chaude. Pour ce disque elle s’entoure d’Obongjayar, aja monet ainsi que de sensibles producteurs comme Jason Lader ou Andrew Lappin. Un album d’un autre temps qui comme une caresse mêle intime et élégance. À savourer sous de belles éclaircies.

Lyra Pramuk – Hymnal

Lyra Pramuk est une américaine qui s’est frottée à la capitale Allemande. Et ça se sent dans sa musique. Elle y fusionne chant classique et culture techno, avec une sensibilité pop visant droit au cœur. Cette hybridation, elle la conçoit au centre de son ADN : artiste pluridisciplinaire, performeuse respectée, astrologue passionnée et autrice en devenir.

En 2020, elleLyra Pramuk se révèle dans sa multiplicité avec un premier album vocal et viscéral, Fountain. En 2025 avec Hymnal c’est une suite plus cosmique et collective, fusionnant voix d’un autre monde, cordes fébriles (Sonar Quartett) et nappes électroniques futuristes. Ce nouvel opus, édité sur son label pop.soil avec 7K!, convoque Steve Reich, Meredith Monk ou Laurie Anderson, et accueille Colin Self, Holland Andrews et Mica Levi.

Thee Diane – Bonjour

Peu peuvent se vanter d’avoir un père sénégalais ayant joué avec Carlos Santana ou une mère choriste ayant accompagné les plus grandes voix africaines, de Manu Dibango à Salif Keïta en passant par Youssou N’dour.

Thee Diane peut faire les deux. Elle grandit dans un cocon de musiques savantes et populaires. Formée dès l’enfance à la méthode Suzuki, elle chante dans les chœurs de la Maîtrise de Paris avant de découvrir la mode, autre langage qu’elle maîtrise. Sa musique en porte les traces : savamment pensée, viscéralement incarnée. Bonjour, son premier EP, navigue entre pop hybride et afrobeat. Entourée de Crystal Murray ou Le Diouck, elle ouvre un espace sensible, transcontinental, où chaleur et puissance cohabitent.

Ruthee – Tout brûle sauf moi

Que le R&B français se tienne bien, Ruthee vient de sortir un album sensible. Celle qui incarne une forme de renouveau du genre, sort Tout brûle sauf moi. Si elle n’est pas au cœur d’un incendie, ses tracks sont des déflagrations aussi envoutantes que profonde. Ruthee flirte avec la soul, la pop urbaine et se laisse tenter par de l’afrobeat brûlant sur « LA LETTRE » et « IDIU SU SUMA », ou de la bossa sur « Miel & Cannelle ». Si on l’avait déjà vue au côté d’Aupinard, Danyl ou Dau, c’est avec Myra qu’elle re-signe sur l’un des morceaux les plus réussis : « AMOR ».

Sam Binga – Club Orthodontics

Hullais (habitant de Hull, finalement) d’origine et installé à Bristol, Sam Binga incarne mieux que personne l’idée que la bass music est une culture populaire vivante. Avec Club Orthodontics, il signe un album redoutablement efficace et érudit, pensé pour le club, mais nourri de décennies de micro-genres – breakstep, Jersey club, amapiano, ghetto house, grime, dancehall…

Quinze morceaux d’une précision chirurgicale, dopés aux zaps, whomps et crashs, portés par des MCs comme Snowy ou Redders et des producteurs comme Machinedrum ou DJ Polo. Pas de démonstration stérile ici : juste un savoir-faire affûté au contact du dancefloor. En allant à l’essentiel, Binga montre à quel point les fondamentaux peuvent être d’une richesse insoupçonnée.